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Ceci malgré le fait que ses Météorologiques établissaient un cadre cosmo-
               logique qui ordonnait les phénomènes climatiques sans distinction claire
               par rapport aux phénomènes astronomiques, et que selon ses conceptions
               les éléments naturels universels (terre, eau, air et feu) se répartissaient par-
               tout  sur  quatre  sphères  concentriques.  Ses  textes  contenaient  toutefois
               quelques intuitions remarquables, comme l’idée d’une stratification des élé-
               ments (l’eau, plus lourde, au-dessous de l’air) et celle selon laquelle la cha-
               leur solaire était responsable de l’évaporation de l’eau.

                 Aristote reprenait ainsi l’idée que la température diminuait avec l’altitude
               et que les nuages étaient composés pour l’essentiel d’eau condensée. De cette
               façon, il a pu bâtir une théorie qui expliquait la localisation verticale des
               nuages. Il pensait que les nuages ne pouvaient pas se former beaucoup plus
               haut que la cime des montagnes, où ils seraient trop proches de la sphère du
               feu, ni trop près du sol, où la chaleur réfléchie empêcherait leur formation.

                 Ses Météorologiques contiennent finalement de nombreuses affirma-
               tions erronées, qui ne peuvent être uniquement attribuées au manque
               d’instruments de mesure précis, et qui sont surtout dues à une insuffi-
               sance conceptuelle. L’affirmation selon laquelle la foudre suit le tonnerre,
               par exemple, ne demande qu’un peu d’observation patiente pour être dé-
               mentie. Il semblerait donc qu’Aristote ne se soit pas beaucoup soucié de
               la réalité, mais qu’il ait seulement cherché à justifier ses propres présup-
               posés, en traitant seulement les phénomènes naturels qui l’intéressaient.
               En dépit de ces réserves, les Météorologiques ont été le premier ouvrage
               traitant de façon systématique de météorologie, et elles en sont restées
               une importante source de références jusqu’au 18 ème  siècle.
                 Ceci avec quelques compléments, puisque tandis qu’Aristote s’occupait
               surtout de théorie, l’un de ses élèves se consacrait davantage aux applica-
               tions pratiques. Théophraste (371-288 avJC) écrivit en effet le premier pré-
               cis de prévision du temps, et il fut par là le second météorologue notable
               de l’histoire, après Aristote. Dans ses petits livres, Sur les signes du temps et
               Sur les vents, il consigna des dizaines d’indices pratiques qui selon lui pou-
               vaient être utilisés pour prévoir la pluie et les vents. Nombre de proverbes
               populaires encore en usage aujourd’hui puisent leur source dans ces livres.
                 La référence prioritaire aux travaux d’Aristote demeura jusqu’aux tra-
               vaux de Jérôme Cardan (1501-1576), et surtout jusqu’à Descartes (1596-
               1650). En effet, dans un appendice de son Discours de la méthode, Descartes a
               traité des phénomènes météorologiques en introduisant un élément quasi-
               atomiste pour expliquer les interactions de l’atmosphère et des océans.


               Marc CARL                    Eco-Savoirs pour tous    rev.1.4 fr         © LEAI      63
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