Page 68 - eco-savoirs pour tous
P. 68

Dove prétendait que les tempêtes n’étaient pas rotatoires, mais qu’elles
          étaient le résultat de fluctuations des courants généraux. Il considérait que,
          dans le cadre du modèle de la circulation générale de Thomson-Ferrel, il
          existait  deux  courants  atmosphériques  principaux,  semblables  à  deux
          fleuves d’air : l’un chaud et humide, situé aux latitudes tropicales, et l’autre
          froid et sec, agissant aux latitudes polaires. Les tempêtes étaient simple-
          ment une transition d’un fleuve à l’autre, le résultat du passage rapide des
          fleuves d’air au-dessus d’une certaine zone. Pour appuyer ses dires, Dove
          présentait de nombreuses observations effectuées en Europe. Les rares
          données pertinentes disponibles ne permettaient pas de choisir entre l’une
          et l’autre des deux théories, si bien que, comme il arrive souvent quand
          les observations ne sont pas suffisantes et que la force des arguments
          scientifiques dépend de l’impact des arguments verbaux, il s’ensuivit une
          série de disputes interminables.

             Ce différend a été résolu par une explication en deux temps. Le premier
          pas consista à reconnaître que la circulation générale était dans un état na-
          turellement turbulent. Cette théorie fut formulée par un groupe de cher-
          cheurs norvégiens passés à la postérité sous le nom d’École de Bergen,
          dirigés par Vilhelm Bjerknes (1862-1951) et par son fils Jakob (1897-1975).
          L’École de Bergen formula l’hypothèse que les perturbations mouvantes
          typiques des moyennes latitudes étaient causées par une confrontation in-
          cessante entre l’air d’origine équatoriale et l’air d’origine polaire.
             La zone de contact était une zone fortement turbulente, dans laquelle
          les masses d’air étaient continuellement brassées, mais où l’on pouvait re-
          connaître des contours nets, les fronts. Le mouvement de ces fronts déter-
          minait le temps atmosphérique qui était observé au jour le jour. Les tourbil-
          lons qui mélangeaient les masses d’air sur le front avaient un cycle bien pré-
          cis, avec des phases nettes de croissance rapide, de stabilisation et d’affai-
          blissement.  Autrement  dit,  les  tourbillons  constitutifs  de  tempêtes  nais-
          saient, croissaient et mouraient, naturellement et de manière récurrente.
             En termes plus précis, Vilhelm Bjerknes (1937-1951) suggéra que la
          circulation que l’on observait jour après jour dans l’atmosphère était le
          résultat du développement d’instabilités de toutes natures. En particulier,
          Bjerknes émit l’hypothèse selon laquelle la circulation de Ferrel-Thom-
          son représentait l’état de base, spontanément instable, de la circulation.
          Les instabilités de l’état de base, après une période initiale de croissance
          linéaire, se stabilisaient plus ou moins, de façon non linéaire, après avoir
          déformé et tordu la circulation de Ferrel-Thomson.



          68                                        Eco-Savoirs pour tous    rev.1.4 fr        © LEAI         Marc CARL
   63   64   65   66   67   68   69   70   71   72   73