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Dans cet espace, il suffisait de considérer que ce qui semblait être une
          paire de points aux antipodes était un seul point, et qu’une circonférence
          maximale était une droite. Étant donné deux points, il existait alors une
          seule droite qui les unissait. On peut remarquer toutefois que, dans ce cas,
          étant donné un point (en l’occurrence les deux antipodes) externe à une
          droite, il n’existait aucune droite parallèle passant par ce point, tout en rap-
          pelant que n’importe quelle paire de droites possédait un point d’intersec-
          tion. Il s’agissait bien par conséquent d’une géométrie non-euclidienne.
             Cette rétrospective des idées de Riemann permet de comprendre com-
          ment  les  représentations  mathématiques,  puis  géométriques  et  topolo-
          giques, devinrent au 19  siècle de plus en plus abstraites et éloignées de
                              ème
          l’intuition naturelle. Mais cet éloignement temporaire se révéla productif.
          En effet, quand Albert Einstein (1879-1955) formula sa théorie de la rela-
          tivité, il trouva dans le vaste catalogue des espaces de la géométrie diffé-
          rentielle riemannienne ce qui lui fallait pour décrire mathématiquement un
          espace-temps relativiste à quatre dimensions. L’analyse mathématique se
          ressentit évidemment de cette forte poussée vers l’abstraction, qui la con-
          duisit vers une conception encore plus abstraite et générale (mais parfois
          productive) de fonctions et d’applications quantitatives.
             En fait, l’idée intuitive de la relation entre les quantités était ancienne,
          de même que leurs manipulations arithmétiques, c’est-à-dire les opéra-
          tions entre ces quantités. Il suffisait de penser aux tableaux de calcul dans
          lesquels à chaque nombre on associait son carré, son inverse, ou son lo-
          garithme. Grâce à l’introduction de l’écriture symbolique de l’algèbre,
          l’idée de la relation entre quantités avait été associée à sa représentation
          au moyen d’une formule, si possible en équation. Jusqu’alors, les for-
          mules étaient exprimées au moyen de polynômes, et plus généralement
          d’équations algébriques, dans lesquelles, à partir d’un nombre, on en ob-
          tenait un autre avec des opérations de puissance, d’extraction de racines,
          de multiplication et d’addition.
             Or, il existait d’autres types de relations, comme celles qui liaient un
          nombre et son logarithme. Le logarithme avait été défini par John Napier
          (1550-1617) au début du 17 ème  siècle, pour simplifier les calculs trigono-
          métriques de l’astronomie. Même la somme d’une série infinie pouvait y
          fournir un nombre. En effet, pour n’importe quel nombre x entre 0 et 1,
          3 + 3x + 3x  + 3x  + 3x  +...= 3/1-x. Quand les termes de cette somme
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          devenaient de plus en plus petits, le résultat ultime d’une somme infinie
          était une quantité calculable (pour x entre 0 et 1).

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