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Ce traité, qui pendant longtemps ne fut pas publié librement parce
          qu’il était considéré comme un texte confidentiel important pour la dé-
          fense nationale, eut une influence sur les études d’ingénierie pendant tout
          le 19  siècle, et au 20 ème  siècle encore, sa géométrie appliquée a joué un
              ème
          rôle utile dans ce domaine. En particulier, le traité suscita un intérêt pour
          les propriétés géométriques liées aux projections, dans un sens différent
          de celles de la géométrie euclidienne classique.
             Là, par exemple, les rails sur lesquels roulait un train correspondaient à
          deux droites parallèles qui ne se recoupaient jamais. Mais si un peintre les
          dessinait dans un tableau, selon les règles de la perspective et des impres-
          sions visuelles, elles se rencontraient en un point à l’horizon. En 1827, le
          mathématicien français Jean-Victor Poncelet (1788-1867) publia donc un
          traité sur les propriétés projectives des figures, qui fut à l’origine d’une
          branche  nouvelle  d’études  géométriques  théoriques,  appelée  géométrie
          projective. Pour sa part, Monge s’occupa de codifier de façon exacte et
          ordonnée, pour ses étudiants, les méthodes servant à résoudre des pro-
          blèmes géométriques en combinant des coordonnées et des équations.
             Il créa ainsi une autre nouvelle branche, la géométrie analytique, qui
          permettait d’étudier les propriétés des courbes et des surfaces, dans le plan
          et dans l’espace, avec leurs intersections et de nombreuses autres proprié-
          tés, sans utiliser de figures. Nous avons vu ci-avant comment des fonctions
          dérivables servaient à calculer la tangente à une courbe en un point, c’est-
          à-dire à étudier des propriétés géométriques autour du point.
             En allant plus loin, Monge, ainsi que deux mathématiciens allemands
          qui travaillaient dans la ville de Göttingen, Carl Friedrich Gauss (1777-
          1855) et Bernhard Riemann (1826-1866), montrèrent comment les mé-
          thodes infinitésimales pouvaient aussi être appliquées avec succès à la géo-
          métrie, où l’étude infinitésimale des surfaces fournissait une base à la to-
          pographie et à la cartographie. C’est ainsi que naquit une autre branche des
          études  géométriques  :  la  géométrie  différentielle.  L’introduction  de  ces
          nouveaux concepts transforma profondément les études géométriques.
             Pendant des siècles, la géométrie s’était occupée de l’étude des figures
          dans l’espace, cet espace étant considéré comme un simple récipient des
          corps, une étendue indéfinie et neutre, où l’espace géométrique était une
          idéalisation de l’espace physique réel, dont la géométrie euclidienne clas-
          sique ne faisait qu’en refléter des propriétés apparentes. Mais les nouvelles
          recherches mathématiques  faisaient naître de nombreux doutes  sur ces
          propriétés, et suggéraient des possibilités différentes.



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