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C’est ainsi que furent banalisées de nouvelles techniques d’abréviation
et de notation des inconnues, des puissances, des signes d’addition et de
soustraction et ainsi de suite. Cette pratique usuelle subsista en Alle-
magne jusqu’au début du 18 ème siècle, même si elle restait séparée des
mathématiques supérieures. Puis en 1591, le français François Viète
(1540-1603) publia son œuvre In artem analyticem isagoge, dans laquelle il
réorganisait les notations algébriques, et ramenait l’algèbre aux canons
méthodologiques des mathématiques grecques classiques.
Finalement, d’une manière ou d’une autre, en utilisant tout cela, dès
le 14 ème siècle, la Renaissance italienne, et sa diffusion dans le reste de
l’Europe, avaient pu impulser un processus de transformation des ma-
thématiques, qui retrouvèrent peu à peu une place centrale dans la pensée
rénovée de l’époque, et qui se renforcèrent de plus en plus en préparant
la restructuration scientifique qui allait intervenir deux siècles plus tard.
L’ouverture sociale au renouveau culturel s’élargissait en conséquence.
Outre à l’activité commerciale, la formation mathématique enseignée par
les maîtres d’abaque s’adressait aussi à des cartographes, architectes, ar-
tistes. Des peintres, tels que Piero della Francesca, Leon Battista Alberti, et
Albrecht Dürer, se montraient réceptifs aux savoirs géométriques liés no-
tamment aux phénomènes de perspective. Ailleurs, la découverte de la
poudre et la création de nouvelles armes à feu suscitèrent un intérêt pour
la précision mathématique de la balistique, permettant l’étude non empi-
rique des trajectoires des projectiles. Le problème de la fabrication des len-
tilles suscita également un intérêt pour les calculs d’optique. En outre, l’as-
tronomie et la cartographie affinèrent leurs méthodes pour répondre aux
besoins des grandes expéditions maritimes du 15 et du 16 siècles.
ème
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La vitalité de cette période ne s'exprimait pas seulement dans les arts et
les activités pratiques appuyés sur les mathématiques, puisque l’intérêt pour
les instruments et les observations naturelles stimulait aussi le développe-
ment de questionnements plus originaux. Au point que des penseurs remi-
rent en question la philosophie aristotélicienne qui régnait dans les univer-
sités, et même le principe d’autorité qui en accompagnait la transmission.
Ils estimaient que la scolastique induisait un raisonnement vide et abs-
trait, trop formel et trop peu créatif. Ces nouvelles tendances favorisèrent
par leur synergie une relecture des textes antiques, pour y chercher d'éven-
tuelles voies de relance. Et heureusement, car bien que certains grands
traités antiques, comme ceux d’Archimède et d’Apollonios, soient dispo-
nibles çà et là, ils avaient depuis longtemps été délaissés, car mal compris.
Marc CARL Eco-Savoirs pour tous rev.1.4 fr © LEAI 329