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Il restait à établir si la réaction se produisait avec le constituant de l’air
          qu'avait découvert Joseph Black, et qu’il avait appelé air fixe, ou bien si elle
          avait lieu avec l’air commun tout entier, ou même avec un autre constituant
          inconnu. Entre-temps, il avait remarqué qu’en chauffant de la chaux mé-
          tallique en présence de carbone, il se formait de l’air fixe, c’est-à-dire du
          gaz carbonique. Et en 1775, après avoir simplement répété les expériences
          de Priestley avec du mercure, Lavoisier se rendit compte que ce n’était
          qu’un seul des constituants de l’air, le plus pur et le plus respirable, qui
          réagissait avec les métaux pour donner des chaux, et que respiraient effec-
          tivement les êtres vivants pour entretenir leur métabolisme.
             Dans les années suivantes, Lavoisier détermina que l’air était formé es-
          sentiellement de deux constituants. L’un, pur et respirable, réagissait avec
          les métaux durant leur calcination et permettait la vie en se combinant avec
          le carbone contenu dans les organismes biologiques. L’autre, qui ne per-
          mettait pas la vie, était considéré par Lavoisier comme une mofette, ou
          autrement dit, d'un air méphitique, déjà remarqué par Rutherford.
             Plus tard, en 1778, Lavoisier changea d’idée et appela la mofette azote
          (du grec "sans vie"). Et en 1779, il nomma oxygène (du grec former un
          acide) le gaz pur et respirable qui semblait jouer un rôle si important dans
          la réaction de formation des acides de phosphore et de soufre.
             Il y en aurait eu assez, à la fin des années 1770, pour faire entrer La-
          voisier dans l’histoire de la chimie moderne, mais il n’en était qu’au début
          de sa contribution. En fait, le jeune aristocrate se rendit alors compte
          qu’il disposait d’assez de preuves pour soumettre à une attaque en règle
          la théorie du phlogistique, et il commença à concevoir le livre par lequel
          il portera un coup définitif à la théorie de Stahl. L’ouvrage ne paraîtra que
          dix ans plus tard, mais entre-temps, Lavoisier prépara le terrain. Dans
          une présentation à l’Académie, en 1782, il décrivit les points faibles du
          paradigme de Stahl, et il annonça qu’il pouvait proposer une autre théorie
          de la combustion capable d’écarter ces points faibles et de remplacer la
          théorie du phlogistique, en prouvant que dans toute combustion, c’était
          la combinaison avec l’oxygène qui produisait la chaleur et la lumière.
              L’opportunité de sa démonstration définitive fut fournie, une fois
          encore, par son analyse critique de l’expérience d’un autre chimiste. En
          effet, en 1781, Henry Cavendish, en Angleterre, avait observé que si de
          l’air inflammable (l’hydrogène) brûlait avec de l’air normal, cela produi-
          sait de l’eau pure. Il avait remarqué aussi que si on faisait exploser un
          mélange d’air inflammable et d’air commun avec une étincelle électrique,
          il se formait de l’acide nitrique.

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