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Et en 1772, à 29 ans, la chimie de la combustion était même devenue
               son centre d’intérêt scientifique principal, un intérêt qui l’amènera à définir
               de nouvelles lois générales de la chimie. Lavoisier était riche, ce qui lui per-
               mettait d’utiliser chez lui un laboratoire, moderne pour l’époque. Mais cette
               ressource pratique ne lui aurait pas suffi sans son génie intuitif et sa méthode
               de travail rigoureuse. Avant de décider une expérience, Lavoisier lisait toute
               la littérature disponible, puis il préparait son expérience, au besoin en cons-
               truisant lui-même les instruments nécessaires, et enfin il l’exécutait. Il cher-
               chait ensuite à distinguer, dans les résultats, des relations et des processus
               fondamentaux. Lavoisier lisait Boyle, Becher, Stahl, Booerhave, et il se ren-
               dait compte que dans la théorie du phlogistique (mais aussi dans d’autres
               hypothèses de ces chercheurs), nombreuses étaient les incohérences. Il était
               temps pour lui, par conséquent, de concevoir des expériences pour les lever.
                 Sa première expérience officielle, en 1772, fut plutôt spectaculaire.
               Avec un groupe d’autres chimistes, il démontra en public qu’il était pos-
               sible de brûler même du diamant, si l’on fournissait suffisamment de cha-
               leur, et pour ce faire, il atteignit les hautes températures nécessaires au
               moyen d’un grand miroir ardent.

                 Mais ce sont ses expériences quantitatives sur les gaz qui amenèrent
               Lavoisier à des  succès plus scientifiquement significatifs. Dès la fin de
               1772, il était en mesure d’annoncer à l’Académie Royale des Sciences, dont
               il devint le plus jeune membre (et le trésorier), que lorsque le phosphore
               brûlait, son poids augmentait parce qu’il se combinait avec l’air pour for-
               mer un "esprit acide du phosphore".

                 Lavoisier se rendit compte qu’une combinaison analogue avec l’air se
               produisait lors de la calcination de divers métaux, qui augmentaient de
               poids en formant de nouveaux composés chimiques. Il parvint dans son
               laboratoire à effectuer une calcination de l’étain et du plomb, pour dé-
               montrer non seulement que le processus se faisait avec une augmentation
               de poids dans le cas de ces métaux, mais sans comporter pour autant,
               comme le croyait Boyle, une absorption de particules de feu.
                 Il suffisait en effet de calciner de l’étain et du plomb dans un récipient
               vide d’air, et scellé, puis de vérifier par pesée qu’il ne s’y produisait aucune
               augmentation de poids. C’est en ouvrant le récipient que l’air pouvait en-
               suite affluer, et le métal augmenter de poids, ce qu'indiquait la pesée. Il était
               évident, par conséquent, que la calcination se faisait non par absorption de
               particules de feu, mais par réaction chimique du métal avec l’air, l’augmen-
               tation de poids étant une conséquence du processus de combustion.



               Marc CARL                    Eco-Savoirs pour tous    rev.1.4 fr         © LEAI      273
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