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Boyle trouva un partisan convaincu de ses théories en la personne
               d’Isaac Newton, qui s’intéressait aux observations de la chimie, comme
               il le démontrait dans une grande partie de son livre Opticks. Newton, à
               vrai dire, avait aussi une hypothèse plus personnelle sur les raisons qui
               poussaient la matière à s’unir : il pensait que les particules dont parlait
               Boyle s’attiraient mutuellement. Mais il évitait d'avancer cela, parce que
               Boyle pouvait considérer cette attraction comme une force occulte. En
               outre, la théorie de Boyle n’était pas encore une théorie complète et vé-
               rifiée de la combustion, et il avait notamment essayé d’y démontrer (en
               se trompant) que l’air n’était pas un élément indispensable au processus.
                 Après Boyle, Robert Hooke (1635-1702) formula en 1665 une autre
               hypothèse rectificatrice selon laquelle seul un élément de l’air participait à
               la réaction. Mais personne n’était encore en mesure de donner une expli-
               cation fondée et cohérente à des phénomènes tels que la calcination des
               métaux, et la combustion des substances organiques comme le bois. Et a
               fortiori, personne n’était alors en mesure de dire avec exactitude quels élé-
               ments fondamentaux participaient à ces processus.
                 Malgré le tournant culturel imprimé par Boyle à la science chimique, il
               subsistait donc un état de confusion théorique qui ne parvenait pas à se
               dissiper, au point que dans les années où la physique théorique obtenait un
               nouveau succès retentissant, grâce à la vision cohérente et fondamentale de
               la mécanique proposée par Newton, par contre dans le domaine de la chi-
               mie intervenaient des personnages somme toute dépassés, comme Johann
               Joachim Becher (1635-1682), qui proposait encore, comme éléments fon-
               damentaux de la matière, l’air, l’eau, et la terre, selon l’héritage d’Aristote.

                 L’air, soutenait Becher, ne pouvait pas participer à des réactions chi-
               miques. Et l’eau ne possédait que ses seules propriétés spécifiques évidentes
               à l'époque, si bien que toutes les substances chimiques n'étaient que diffé-
               rents mélanges des trois types de terre : la vitreuse qui, comme le pensait
               déjà Paracelse, donnait la matière ; la grasse, ou terra pinguis, qui fournissait
               l’aptitude à la combustion, et qui se dégageait de la substance brûlée ; et la
               fluide, qui conférait la densité et le brillant.
                 Cette  théorie  n’était  qu’une  nouvelle  présentation  d’anciennes  hypo-
               thèses, et elle ne mériterait pas d’être citée si elle n’était le point de départ
               d’une  nouvelle  hypothèse  plus  solide  qu’élabora  un  disciple  de  Becher,
               Georg Ernst Stahl (1660-1734). Cette hypothèse devint célèbre sous le nom
               de théorie du phlogistique. Stahl était un médecin prussien, vitaliste et de
               tendance mystique, mais qui connaissait bien les besoins et les problèmes
               de l’industrie métallurgique.


               Marc CARL                    Eco-Savoirs pour tous    rev.1.4 fr         © LEAI      267
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