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Dans ce but, Van Helmont planta un arbre dans une quantité de terre
               pesée (164 livres) et il l’arrosa pendant 5 ans. Après quoi, il pesa la terre
               à nouveau et observa, comme il s’y attendait, que son poids était toujours
               égal à  164 livres.  Cela  démontrait,  soutint  Van  Helmont, que le  petit
               arbre, qui était devenu un arbre adulte, était fait d’eau. La conclusion était
               erronée ; mais l’utilisation de la méthode expérimentale quantitative pour
               démontrer une conjecture était une nouveauté, qui suivait le mouvement
               culturel en train d'influencer toute la nouvelle science de l’époque, et dont
               le physicien Galilée devenait un représentant prestigieux.
                 Mais malgré cette amélioration conceptuelle, la nouvelle chimie expéri-
               mentale avait encore du mal à obtenir des succès nets, parce que la matière
               restait plus difficile à analyser que la mécanique, et parce que la chimie ne
               parvenait pas à se séparer assez de l’approche scolastique d’Aristote, au
               moins jusqu’en 1661, année où en Angleterre Robert Boyle (1627-1691)
               publia son livre The Sceptical Chymist (le chimiste sceptique).
                 Sceptique sur quoi, sinon à l’égard des anciennes hypothèses aristoté-
               liciennes, adoptées jusqu'alors comme un dogme par la culture scolas-
               tique. Effectivement, Boyle essaya de débarrasser la chimie des concepts
               occultes et des notions de sympathie et de haine qui devaient, selon la
               théorie pas encore répudiée du Stagirite, porter les substances matérielles
               à s’unir et à se décomposer.

                 Boyle chercha aussi à débarrasser la chimie de l'influence excessive du
               feu, encore considéré comme un élément fondamental, qui se dégageait
               de la matière qui brûlait, et dont l’unique action, selon Aristote, était de
               décomposer la matière, parce qu’il était doté d’un principe de combusti-
               bilité. Bref, Boyle essaya d’affranchir la chimie non seulement de la phi-
               losophie aristotélicienne, et des traditions alchimistes résiduelles et résis-
               tantes, ainsi que de toutes les interprétations ésotériques à la Paracelse,
               qui étaient encore en vogue parmi les chimistes-médecins.

                 Boyle entendait insérer les études chimiques dans une démarche de
               rationalité scientifique, associée en partie à une cosmologie mécaniste,
               une vision qu’avaient esquissés les travaux de Galilée, puis qui avait été
               plus explicitement formulée par Descartes, et qui était en train d’obtenir
               de nombreux et rapides succès dans le domaine de la physique. Boyle
               faisait sienne, en lui donnant une contribution originale, une vision de
               l’univers considéré comme un grand mécanisme d’horlogerie, dans lequel
               n’opéraient que la matière et le mouvement, et où il n’y avait pas de place
               pour des forces occultes, nées seulement d'esprits humains mal informés.



               Marc CARL                    Eco-Savoirs pour tous    rev.1.4 fr         © LEAI      265
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