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L’année suivante le National Institute of Health des USA a interdit diffé-
               rents types d’expériences. Mais la recherche génétique est restée encouragée
               par de puissants intérêts marchands et financiers privés, et la communauté
               scientifique sponsorisée a fait décerner, en 1978, un Prix Nobel de médecine
               à Nathans et à Smith pour la découverte et l’utilisation des enzymes de res-
               triction, puis en 1980, un Prix Nobel de chimie a été attribué à Frederick
               Sanger pour le développement de ses nouvelles techniques de séquençage.
                 L’un des résultats les plus surprenants obtenus dans les dernières décen-
               nies du 20  siècle par la biologie moléculaire a été la démonstration selon
                       ème
               laquelle l’organisation génétique des organismes complexes était différente
               de celle des simples bactéries. Alors que chez les bactéries la structure du
               chromosome était linéaire et continue, dans les organismes supérieurs les
               gènes étaient fragmentés, et interrompus par de longues séquences de bases
               non codantes. Durant le processus de transcription, ces parties étaient igno-
               rées et l’unité du message était conservée. En 1978, Walter Gilbert (1932-
               1982) a proposé une terminologie ad-hoc, appelant exons les séquences de
               nucléotides  qui  font  partie  du  gène  et  qui  sont  ensuite  transcrites  dans
               l’ARNm, et introns les parties non codantes ou silencieuses du génome.
                 Une transcription simple pouvait alors se compléter d’une rectification
               de la séquence de nucléotides composant l’ARNm, puisque certains traits
               de la molécule étaient éliminés (les séquences liées aux introns), tandis que
               d’autres traits étaient associés entre eux (les séquences correspondant aux
               exons), pour reformer l’intégrité du message génétique. En outre, un pa-
               rallèle était remarqué entre les introns et des gènes appelés sauteurs, ca-
               pables de changer de position sur le canevas génétique. Cela signifiait que
               des introns étaient capables de se déplacer sur des chaînes d’ADN, d'une
               manière déjà décrite par Barbara McClintock dès les années 1940.
                 Cette généticienne américaine, qui avait passé une grande partie de sa
               vie scientifique dans le Cold Spring Harbor Laboratory, était parvenue, au
               cours de ses études génétiques sur le plant de maïs, à la conclusion qu’il
               existait des éléments génétiques en mesure de modifier le comportement
               de gènes adjacents. Mais ce qu’elle trouvait surprenant, c’est que ces élé-
               ments semblaient disparaître de l’endroit où ils se trouvaient auparavant
               pour réapparaître ailleurs.
                 Même si les recherches de Barbara McClintock n’ont pas rencontré
               d’ostracisme de la part de la communauté scientifique, elles n’ont pas
               reçu immédiatement l’attention qu’elles méritaient. Car à cette époque,
               on concevait le génome comme une structure fixe, et l’idée que les gènes
               puissent sauter semblait trop étrange.


               Marc CARL                    Eco-Savoirs pour tous    rev.1.4 fr         © LEAI      227
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