Page 227 - eco-savoirs pour tous
P. 227
L’année suivante le National Institute of Health des USA a interdit diffé-
rents types d’expériences. Mais la recherche génétique est restée encouragée
par de puissants intérêts marchands et financiers privés, et la communauté
scientifique sponsorisée a fait décerner, en 1978, un Prix Nobel de médecine
à Nathans et à Smith pour la découverte et l’utilisation des enzymes de res-
triction, puis en 1980, un Prix Nobel de chimie a été attribué à Frederick
Sanger pour le développement de ses nouvelles techniques de séquençage.
L’un des résultats les plus surprenants obtenus dans les dernières décen-
nies du 20 siècle par la biologie moléculaire a été la démonstration selon
ème
laquelle l’organisation génétique des organismes complexes était différente
de celle des simples bactéries. Alors que chez les bactéries la structure du
chromosome était linéaire et continue, dans les organismes supérieurs les
gènes étaient fragmentés, et interrompus par de longues séquences de bases
non codantes. Durant le processus de transcription, ces parties étaient igno-
rées et l’unité du message était conservée. En 1978, Walter Gilbert (1932-
1982) a proposé une terminologie ad-hoc, appelant exons les séquences de
nucléotides qui font partie du gène et qui sont ensuite transcrites dans
l’ARNm, et introns les parties non codantes ou silencieuses du génome.
Une transcription simple pouvait alors se compléter d’une rectification
de la séquence de nucléotides composant l’ARNm, puisque certains traits
de la molécule étaient éliminés (les séquences liées aux introns), tandis que
d’autres traits étaient associés entre eux (les séquences correspondant aux
exons), pour reformer l’intégrité du message génétique. En outre, un pa-
rallèle était remarqué entre les introns et des gènes appelés sauteurs, ca-
pables de changer de position sur le canevas génétique. Cela signifiait que
des introns étaient capables de se déplacer sur des chaînes d’ADN, d'une
manière déjà décrite par Barbara McClintock dès les années 1940.
Cette généticienne américaine, qui avait passé une grande partie de sa
vie scientifique dans le Cold Spring Harbor Laboratory, était parvenue, au
cours de ses études génétiques sur le plant de maïs, à la conclusion qu’il
existait des éléments génétiques en mesure de modifier le comportement
de gènes adjacents. Mais ce qu’elle trouvait surprenant, c’est que ces élé-
ments semblaient disparaître de l’endroit où ils se trouvaient auparavant
pour réapparaître ailleurs.
Même si les recherches de Barbara McClintock n’ont pas rencontré
d’ostracisme de la part de la communauté scientifique, elles n’ont pas
reçu immédiatement l’attention qu’elles méritaient. Car à cette époque,
on concevait le génome comme une structure fixe, et l’idée que les gènes
puissent sauter semblait trop étrange.
Marc CARL Eco-Savoirs pour tous rev.1.4 fr © LEAI 227