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Une supplémentation de vitamine C, par exemple, paraissait indispensable
à l’Homme, aux singes, aux cobayes, et aux chauves-souris, mais pas à la plu-
part des autres animaux. En fait, il devint plus clair qu’il fallait consommer à
la fois des micronutriments (et pas seulement des vitamines), nécessaires en
petites quantités, telles que des millièmes de gramme par jour, et aussi des
macronutriments, tels que des sucres, des graisses et des protéines, en quan-
tités très supérieures. Et il fallait pouvoir bien assimiler tous ces nutriments.
Dans ce domaine de l’assimilation, des découvertes sur la digestion
avaient résulté de divergences entre iatrophysiciens et iatrochimistes. Les
premiers pensaient que la fonction digestive consistait à réduire les aliments
en fractions de plus en plus petites, à partir de la bouche. Mais les iatrochi-
mistes la considéraient comme un processus de fermentation qui commen-
çait dans l’estomac, avec des ferments acides, et qui se poursuivait avec le
foie, par l’effet du fiel. Prout et d’autres insistaient sur l’action de ces sucs
gastriques, contenant entre autres de l’acide muriatique (chlorhydrique).
La controverse avait été résolue par le génie expérimental de René-An-
toine Ferchault de Réaumur (1683-1757), qui mit au point une technique
pour observer la digestion chez certains animaux grâce à l’introduction de
tubes métalliques. Cette technique mit en évidence deux mécanismes dif-
férents, à savoir une double fermentation chez les ruminants, et une di-
gestion directe chez les carnivores. Par la suite, en perfectionnant les
techniques de Réaumur, Lazzaro Spallanzani (1729-1799) avait vérifié
l’importance de ces sucs gastriques, et il parvint à la conclusion que dans
tous les cas la digestion était avant tout un processus chimique, une con-
clusion confirmée au cours du siècle suivant par la découverte de subs-
tances digestives comme la ptyaline de la salive, et le suc pancréatique.
Une autre grande fonction était restée à expliquer : la fonction respira-
toire, qui posait aux savants deux problèmes depuis le 18 ème siècle. Il y avait
un problème mécanique (comment l’air pouvait-il pénétrer dans les pou-
mons ?) et un problème chimique (quelle propriété avait le mélange de
sang et d’air ?). Le premier problème fut résolu par le mathématicien et
physicien napolitain Giovanni A. Borelli (1608-1679), mais ses travaux
avaient été publié un an après sa mort. Dans le cadre des recherches gui-
dées par son esprit mécaniste cartésien, ce savant déclarait que les muscles
intercostaux étaient les agents actifs de la variation du volume thoracique.
Plus tard, en 1694, Johann Bernoulli (1667-1748) expliqua le phénomène
mécanique de la respiration en d’autres termes, en soulignant l’importance,
dans l’acte respiratoire, de la présence de la cavité pleurale, un espace fermé
délimité par une membrane, la plèvre, placée juste sous les poumons.
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