Page 177 - eco-savoirs pour tous
P. 177

Dès l’obtention de son doctorat de médecine, en 1843, et jusqu’à sa
               mort, il a étudié de nombreux problèmes de physiologie, en y apportant
               chaque fois de nouveaux éclairages. Du point de vue méthodologique, la
               contribution de Claude Bernard a été fondamentale. Son œuvre principale,
               publiée en 1865, Introduction à l’étude de la médecine expérimentale, a servi long-
               temps de référence, y compris dans la physiologie moderne. C’est un ma-
               nifeste de la méthode expérimentale adaptée à la physiologie générale.
                 Sa méthode analysait les processus physiologiques communs à tous les
               êtres vivants, tout en incluant un doute méthodique, mais sans excès ni a-
               priori. Dans son esprit, les phénomènes vitaux, malgré leur spontanéité ap-
               parente, obéissaient à des lois précises et prévisibles ; ils apparaissaient ani-
               més par une finalité intrinsèque, et ils procédaient d'échanges auto-organi-
               sés entre les différentes parties du corps.
                 Cette conception de Claude Bernard, présentée sous l’appellation d’unité
               substantielle du monde vivant, reçut de nombreuses confirmations, appor-
               tées notamment par des études sur l’ultrastructure et sur le métabolisme. Au
               point qu’en 1929, quand K. Lohamann découvrira l’adénosine-triphosphate
               (ATP), on vérifiera que tous les êtres vivants utilisaient effectivement cette
               molécule comme moyen d’échanges interactifs et énergétiques.

                 Certains chercheurs utilisèrent alors cette nouvelle cohérence concep-
               tuelle pour retracer le parcours possible et probable de l’évolution bio-
               chimique. En 1827, William Prout, un médecin anglais, avait déjà démon-
               tré de façon précise que trois classes d’éléments devaient être présentes
               dans l’alimentation : les sucres, les huiles, et l’albumine, laquelle fut re-
               qualifiée de protéine par Gerardus Mulder (1802-1880).

                 Des progrès trans-disciplinaires importants ont été accomplis ensuite
               par Justus von Liebig (1803-1873), qui publia en 1842 un traité, Die Tier-
               chemie, dans lequel il appliquait ses théories chimiques à toute la physio-
               logie, humaine, animale, et végétale. C’est à lui que l’on doit, entre-autres,
               la découverte du fait que, parmi les éléments indispensables à la nutrition
               des êtres vivants, il faut -en petites quantités dosées- des substances mi-
               nérales telles que le sodium, le potassium, le calcium, et le phosphore.
                 Ces substances venant du milieu naturel, il fit remarquer l’appauvrisse-
               ment progressif d'un sol au bout d’années et d’années de culture qui épui-
               saient ces substances. Liebig fut le premier à introduire la nécessité de l’apport
               d'intrants chimiques compensateurs, associés selon des concentrations bien
               dosées, capables de restituer au terrain les éléments nécessaires à la croissance
               des végétaux, ce qui fit aussi de lui le principal fondateur de l'agrochimie.


               Marc CARL                    Eco-Savoirs pour tous    rev.1.4 fr         © LEAI      177
   172   173   174   175   176   177   178   179   180   181   182