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Puis au milieu du 20 ème  siècle, une formulation encore plus explicite
               des  principes  de  la  systématique  phylogénétique  a  été  exposée,  avec
               l’œuvre de l’entomologiste allemand Willi Hennig (1913-1976). Entre-
               temps, le développement de la théorie synthétique de l’évolution, fondée
               sur des études de la génétique des populations, avait favorisé une nou-
               velle confirmation populationniste de la systématique zoologique, avec
               une  subordination  de  la  notion  typologique  d’espèce  à  une  prise  en
               compte de la variabilité intra-spécifique, et avec une nouvelle approche
               de l’espèce dans un sens plus explicitement biologique et dynamique.
                 Dans les dernières décennies du 20  siècle, la systématique a connu une
                                              ème
               autre période particulièrement féconde, qui a favorisé elle aussi une réactua-
               lisation de ses bases. C'était inévitable, car outre l’utilité pratique confirmée
               de la systématique dans la zoologie (rappelons que de nombreuses espèces
               animales attendaient encore leur inscription à l’inventaire des espèces), les
               problèmes que soulevaient les développements modernes de cette science
               induisaient nécessairement des avancées conceptuelles complémentaires.
                 C'est pourquoi, alors que l’école évolutionniste classique, représentée
               par Ernst Mayr (1904-2005) et par George G. Simpson (1902-1984), sou-
               lignait la nécessité d’envisager une population comme une unité évolutive
               et donc taxinomique, sont apparues deux écoles systématiques caractéri-
               sées par une approche et une philosophie différentes : l’école cladistique,
               et l’école dite phénétique nouvelle.
                 La première, née en 1966 après la traduction en anglais des travaux de
               Hennig, a prôné la nécessité d’une reconstruction phylogénétique plus ri-
               goureuse, dont elle a précisé les méthodes. Sur la base de l’évaluation de
               l’état évolutif d’un caractère, c’est-à-dire d’une analyse de sa condition pri-
               mitive puis dérivée, on pouvait réaliser des arbres généalogiques en forme
               de  diagrammes  hiérarchiques,  appelés  cladogrammes,  dans  lesquels  on
               mettait en évidence les points où les espèces qui avaient les liens de parenté
               les plus étroits se détachaient de la souche ancestrale. Là, n’avaient d’an-
               cêtre commun que les espèces (ou les groupes) où un caractère (ou un
               assortiment donné de caractères) se manifestait dans la même condition de
               dérivation ; par exemple l’apparition des ailes chez les insectes et les oi-
               seaux ne les rapprochait pas au niveau phylogénétique.
                 De  son  côté,  l’école  phénétique nouvelle,  qualifiée  accessoirement
               aussi de numérique, renonçait à la possibilité d’attribuer une signification
               phylogénétique aux systèmes de classification, et elle recherchait des mé-
               thodes aussi objectives et neutres que possible pour identifier et interpré-
               ter les similitudes des faits les plus objectivement comparables.


               Marc CARL                    Eco-Savoirs pour tous    rev.1.4 fr         © LEAI      147
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