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Si nous supposons que chacune des femelles a deux rejetons, le nombre
               de femelles qui se reproduisent de façon asexuée doublera à la deuxième
               génération, tandis que le nombre de celles qui se reproduisent sexuellement
               restera constant. À ce niveau, cela représente un désavantage, en termes
               évolutifs, pour la reproduction sexuée, qui mènerait à un moindre fitness.

                 Imaginons en plus qu’une femelle mature ait un bagage génétique par-
               faitement adapté au milieu dans lequel elle vit. Si la femelle est asexuée,
               elle transmettra intact ce bagage. Mais une femelle sexuée ne transmettra
               que la moitié de ses gènes à sa descendance, parce que l’autre moitié sera
               apportée par un mâle qui pourrait n’être pas aussi bien adapté qu'elle à
               son milieu. De cette façon, la descendance de la femelle asexuée pourrait
               avoir des avantages par rapport à celle de la femelle sexuée. Quel intérêt
               adaptatif peut donc avoir la reproduction sexuée dans le cadre de l’évo-
               lution ? Eh bien d'abord, la variabilité.
                 Car la reproduction sexuée génère et entretient une variabilité, et cette
               variabilité peut être avantageuse pour la descendance parce qu’elle lui offre
               une gamme plus vaste de possibilités pour réagir aux changements du mi-
               lieu. En outre, certains points de l’existence et du maintien de la reproduc-
               tion sexuée restent encore appréciables d’un autre point de vue, logique
               scientifiquement. Car les particularités de certains organismes mettent en
               question certaines imperfections apparentes d’adaptation liées au sexe.

                 Les individus mâles chez certains oiseaux ont un plumage voyant, éton-
               namment coloré, qu’ils mettent en évidence lors de leur parade nuptiale. Il
               est probable que le choix de la femelle se portera sur le mâle dont la per-
               formance lui semblera la meilleure. Mais qu’en est-il du danger que court
               ce mâle face à un prédateur, lorsqu’il se promène avec une telle livrée ?
                 En fait, ces types de caractères et de comportements relèvent en général
               de caractères sexuels secondaires, qui ne sont pas directement mis en jeu
               pendant l’acte reproducteur, ou pour les soins de la descendance. La queue
               du paon mâle est un exemple des plus connus. Cet oiseau sera probable-
               ment choisi par la femelle pour sa splendide livrée et pour son beau rituel,
               mais que penser lorsqu’il est attaqué par un prédateur et qu’il est gêné dans
               sa fuite par sa lourde queue ? La réponse est que chez de nombreux ani-
               maux, le succès reproductif est plus important que le risque de prédation.
                 Une autre contribution de l’analyse adaptative est de situer à quel niveau
               d’organisation agit la sélection naturelle. Là, on peut prendre l’exemple du
               lemming, un rongeur qui vit dans la toundra arctique, et qui manifeste des
               comportements étonnants.


               Marc CARL                    Eco-Savoirs pour tous    rev.1.4 fr         © LEAI      109
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