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Car la lutte pour l’existence ne se limite pas à une lutte physique, mais
elle inclut toutes les difficultés qu’un organisme doit surmonter pour
croître et se reproduire. C’est notamment pourquoi la sélection naturelle,
comme moteur de l’évolution, opère aussi par une fécondité appropriée,
à séquences plus ou moins courtes, et en exploitant la variabilité sélective
présente dans les caractères les plus réactifs de la descendance.
Dans le phénomène de mélanisme observé chez Biston betularia (vu
ci-avant), la sélection naturelle favorisait à chaque génération les variantes
les plus sombres qui, ayant moins de probabilités d’être victimes des pré-
dateurs, parvenaient mieux à se multiplier. La descendance de ces va-
riantes plus sombres héritait de la coloration des parents et l’espèce en
était renforcée peu à peu, la reproduction étant assez rapide.
Chaque reproduction maintenait un potentiel utile de variabilité dans la
coloration, pour que de génération en génération, les individus les plus
adaptés survivent et procréent. Par conséquent, pour qu’il y ait sélection
naturelle, il doit y avoir reproduction, variabilité, et hérédité, en temps utile.
La sélection naturelle est un moteur de l’évolution, pour autant qu’elle dé-
veloppe des adaptations réactives opportunes, quantitatives et qualitatives.
Ce modèle de raisonnement peut même éclairer un événement à
l’échelle de millions d’années comme celui de l’évolution des amphibiens
à partir des poissons. Entre -360 et -370 millions d’années avant notre
époque, l’abaissement du niveau océanique facilita l’apparition de cer-
taines adaptations à la vie terrestre. Exploitant leur variabilité, la sélection
naturelle favorisa les formes qui développaient les caractéristiques les
plus adaptées à ce changement, jetant les bases de l’évolution des amphi-
biens, et déterminant leur morphologie et leur physiologie.
Pour se faire une idée de la variabilité à l'œuvre dans la nature, il suffit
de regarder autour de soi et d’observer qu’il n’existe pas deux êtres vrai-
ment identiques, à moins qu’il ne s’agisse de jumeaux homozygotes. La
variabilité est présente à tous les niveaux de la vie, aussi bien au niveau des
structures comme les organes ou les membres, qu’au niveau des cellules,
des protéines ou des séquences d’ADN. Dans chaque population, il existe
une variabilité, active à tous les niveaux, qui influe sur le fitness des orga-
nismes. Et les organismes qui ont un plus grand fitness ont une plus grande
probabilité de se reproduire et de contribuer à la génération suivante.
Rappelons à ce propos, incidemment, que le renforcement conscient
de l’adaptabilité permanente, exploitant la variabilité réactive de notre
propre espèce, est aussi un objectif majeur de l’éco-humanisme moderne.
Marc CARL Eco-Savoirs pour tous rev.1.4 fr © LEAI 105