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Napoléon I  envoya deux navires français, Le Géographe et Le Natu-
                           er
               raliste, qui eurent des échanges avec des expéditions russes, danoises et
               britanniques. Les savants embarqués étaient souvent des médecins polyva-
               lents, préparés intellectuellement à toutes les découvertes. Sur place, pen-
               dant que différentes notions géographiques étaient consolidées, un grand
               nombre d’échantillons géologiques et biologiques étaient recueillis. Et pro-
               gressivement, la mer commença à intéresser en outre d’éminents physi-
               ciens et chimistes. La première analyse de l’eau marine fut publiée par le
               chimiste français Antoine-Laurent de Lavoisier en 1776, tandis que Pierre-
               Simon de Laplace élaborait une théorie des marées en se fondant sur les
               résultats de Newton. Pour sa part, James Rennel réalisa une première syn-
               thèse des courants atlantiques en 1832.

                 Au milieu du 19  siècle, il y avait donc une communauté de scienti-
                               ème
               fiques qui savaient que les océans constituaient un système interactif d’une
               grande richesse, avec des constituants physiques, chimiques et biologiques
               particulièrement complexes. De nouveaux instruments de mesure et d’ana-
               lyse furent progressivement installés sur des navires de recherche, tandis
               que des gouvernements appréciaient l’intérêt que les informations recueil-
               lies lors des campagnes d’explorations océaniques représentaient sur l’échi-
               quier politique et stratégique mondial. Un nouveau domaine scientifique
               était prêt à s’organiser avec de tels buts et moyens.
                 Et le développement industriel lui donna une importance accrue. Lors-
               que l’essor du télégraphe conduisit à poser des câbles transocéaniques, les
               opérateurs ont eu besoin d’aide pour connaitre la profondeur et la nature
               des fonds, et y choisir de bons tracés. Un renforcement significatif de l’océa-
               nographie résulta de cette combinaison d’intérêts, et le domaine commença
               à se structurer comme une science. L’usage du mot océanographie se ré-
               pandit. Dans un dictionnaire français de 1878, on le trouvait encore défini
               simplement comme une description de l’océan, mais en Allemagne on com-
               mençait à utiliser le terme de thalassographie, et à la fin du siècle, l’usage du
               terme océanographie était devenu courant. En Russie, on utilisait le terme
               d’océanologie. Quant aux États-Unis, l’océanographie y fut liée au dévelop-
               pement du pays, et fortement conditionnée par le climat de frontière pré-
               dominant encore au 19  siècle ; les océans y devinrent un prolongement
                                  ème
               de leur expansion territoriale, une sorte de frontière supplémentaire, qu’il
               fallait aussi explorer et décrire.
                 C’est ainsi que fut institué aux USA un service de cartographie des eaux
               côtières, qui traitait aussi des voies d’eau intérieures, tandis que la haute
               mer était confiée à la Marine, qui institua un "Dépôt légal des cartes".


               Marc CARL                    Eco-Savoirs pour tous    rev.1.4 fr         © LEAI      51
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