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Or, la dérive produite par les grands courants océaniques était forte,
          notamment celle du grand courant nord-équatorial allant de l’Afrique vers
          les Amériques, identifié et signalé par Christophe Colomb au cours de son
          troisième voyage. Ailleurs, à la même époque, des navigateurs portugais
          découvraient et cherchaient à exploiter le courant des Aiguilles en Afrique
          orientale. Dans le Pacifique, l’existence du Kuroshio, un courant qui por-
          tait au nord puis au nord-est le long des côtes du Japon et de la Sibérie
          jusqu’en Amérique du Nord, était connu des pilotes espagnols des galions
          qui assuraient la liaison entre leurs colonies des Philippines et du Mexique.
             Ces courants influaient évidemment sur les routes choisies par les na-
          vires selon leur destination. Par exemple, le galion espagnol qui reliait
          Manille au Mexique chaque année, suivait des routes différentes à l’aller
          et au retour. À l’aller, vers Manille, il suivait la route équatoriale, en cher-
          chant à exploiter le courant pacifique nord-équatorial qui allait vers l’Asie,
          mais au retour il cherchait à suivre le Kuroshio, et donc il remontait très
          au nord, le long des côtes de la Sibérie, puis il redescendait toute l’Amé-
          rique du Nord jusqu’au Mexique.
             Si on survivait aux tempêtes, aux maladies et aux erreurs de direction,
          cet aller-retour durait deux ans. De la même façon, le parcours le plus
          rapide entre l’Europe et l’Afrique méridionale ne consistait pas à suivre
          les côtes africaines, où les vents et les courants allaient en sens contraire,
          mais à traverser l’Atlantique vers le Brésil, et à descendre le long des côtes
          argentines, jusqu’à rencontrer le courant Circumpolaire antarctique, qui
          décrivait un grand anneau autour du continent antarctique, ce qui facili-
          tait un passage rapide vers le Cap de Bonne-Espérance. Pendant de nom-
          breux siècles, les informations recueillies dans les portulans représentè-
          rent presque toutes les connaissances pratiques de l'océanographie.
             Puis un nouveau développement océanographique s’amorça, suite aux
          trois grands voyages du capitaine James Cook, accomplis dans le Pacifique
          entre 1768 et 1779. Lors de ces voyages, les navires de Cook avaient à bord
          des chronomètres qui permettaient de calculer avec une meilleure précision
          la longitude, et donc d'améliorer la position relevée. La connaissance plus
          fiable de la position géographique permettait aussi une meilleure estimation
          de  l’effet  de  dérive  des  courants.  La  publication  du  compte  rendu  des
          voyages de Cook contribua fortement à élargir l’horizon culturel et pratique
          européen, et à vulgariser la connaissance des conditions de déplacement sur
          les océans, où les principales nations européennes de l’époque organisèrent
          alors davantage de voyages d’exploration, parfois en commun.



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