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Mais en raison, entre autres, des difficultés de communication entre
l’Union soviétique et les pays occidentaux, les études des savants soviétiques
furent souvent ignorées jusqu’aux années 1990. Et les apports de Poincaré
n’eurent pas un meilleur sort, puisque même si en 1927 le mathématicien
américain George David Birkhoff avait publié un livre intitulé Systèmes dy-
namiques, dans lequel il développait les idées de Poincaré, la tendance majo-
ritaire chez les mathématiciens occidentaux avait été d’abandonner progres-
sivement les travaux liés à la physique classique, pour se concentrer sur des
recherches utilisant notamment un nouveau langage axiomatique.
De leur côté, dans des laboratoires industriels, des ingénieurs et des ma-
thématiciens appliqués traitaient plus pragmatiquement des phénomènes
qui ne pouvaient pas être résolus par des approches linéaires classiques, no-
tamment des phénomènes d’électronique, de régulation automatique, et
d’aérodynamique. Une équation innovante d’auto-oscillateur avait été intro-
duite par l’ingénieur hollandais Balthasar Van der Pol, en 1922, pour expli-
quer le comportement d’un dispositif radiotechnique. Il remarquait oppor-
tunément que cette équation pouvait servir à expliquer le fonctionnement
d’autres systèmes, comme le battement cardiaque ou le marteau pneuma-
tique, anticipant une approche scientifique potentiellement plus large.
C’était d’autant plus intéressant que dans les applications utilitaires, on
réglait déjà les problèmes de façon aussi concrètement utile que possible.
Même durant la seconde guerre mondiale, alors que les recherches liées
aux applications pratiques étaient une priorité de défense nationale, no-
tamment dans le laboratoire américain de Los Alamos, où était construite
la bombe atomique, les problèmes à résoudre ne ressortissaient pas tant
de la physique nucléaire que de la dynamique appliquée des fluides.
À la fin de cette guerre, le mathématicien John von Neumann manifesta
pourtant un nouvel intérêt pour la physique mathématique. En observant
que la situation des problèmes non linéaires restait pendante, il affirma que
sous les incertitudes mathématiques du moment se cachaient certainement
d’importantes découvertes potentielles, mathématiques et physiques.
Von Neumann pensait que de nouveaux calculateurs électroniques
pourraient faciliter le développement de la recherche dans ce domaine.
Après lui, entre les années 1960 et 1970, sans partir d’une conception théo-
rique abstraite, mais séduits en revanche par la possibilité d’effectuer un
grand nombre de calculs à l’aide des plus récents dispositifs électro-méca-
niques, certains savants tentèrent d’obtenir de nouveaux résultats dans
l’étude de phénomènes décrits par des équations non linéaires.
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