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Pour sa part, Michel-Eugène Chevreul, qui avait publié en 1823 un livre
intitulé Recherches chimiques sur les corps gras d’origine animale, avait déjà pu
démontrer que des savons obtenus par saponification des graisses, et trai-
tés avec des acides, donnaient naissance à des produits cristallisés, de véri-
tables acides, comme l’acide butyrique et l’acide stéarique, qu’il avait isolés.
La graisse d’origine animale, par conséquent, était le résultat d'une com-
binaison de glycérine avec de tels acides organiques, à la faveur d’une liai-
son qui paraissait semblable à celle qui conduisait à la formation des sels
dans le monde inorganique. Le processus de saponification, soutenait Che-
vreul, consistait en une décomposition d’un sel gras par une base, cette
dernière prenant la place de la glycérine anhydre. Lavoisier, comme nous
l’avons déjà vu, avait lui aussi travaillé dans le domaine de la chimie orga-
nique, en donnant du crédit à cette nouvelle discipline de la chimie.
Mais ce n’est qu’au début du 19 ème siècle que la chimie organique allait
connaître un développement vraiment significatif, grâce aux résultats aux-
quels nous venons de faire référence, mais grâce aussi à la méthode mise
au point par Justus Liebig pour analyser les composés organiques, et grâce
à la méthode d’analyse des composés azotés mise au point, en 1883, par
Jean-Baptiste Dumas. Grâce à ces méthodes, peu à peu, les chimistes iso-
lèrent, étudièrent, et même synthétisèrent dans leurs laboratoires, un en-
semble croissant de produits organiques. Et ceci sans trouver ni trace ni
empêchements d'une vis viva. Au point que Marcelin Berthelot put pu-
blier sans contestation, en 1860, un livre sur la chimie organique, où il
démontrait la possibilité de synthétiser tous les produits organiques à par-
tir de quelques corps simples, le carbone, l’hydrogène, l’oxygène, et
l’azote. Il y démontrait que, bien que beaucoup plus complexe, la chimie
organique ne semblait pas s’écarter des lois générales de la chimie.
Compte tenu de ces résultats, des chimistes abandonnèrent l’hypothèse
vitaliste, et ils essayèrent d’expliquer le comportement des substances biolo-
giques par de nouvelles théories. La première a été la théorie des radicaux,
que l’on peut attribuer à Guyton de Morveau (1737-1816). Ce chimiste fran-
çais soutenait en effet que dans chaque acide il existait une substance simple
qui modifiait l’oxygène, et qu’il appelait radical de l’acide. Lavoisier admit
cette idée, en vérifiant que dans les substances inorganiques, l’union avec
l’oxygène était produite par un radical simple, tandis que dans les substances
organiques, intervenait un radical complexe. Gay-Lussac reprit lui aussi ce
concept, et il donna l’exemple du radical cyanure qui, résultant d’une liaison
entre l’azote et le carbone, subissait une série de réactions, semblables à celles
du chlore et de l’iode, sans présenter de modifications.
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