Page 156 - Annales EH 1998-2018
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La nécessité doit d’abord devenir plus évidente dans une large partie de la société ci-
                             vile mondiale, pour pouvoir être traduite ensuite en propositions politiques réalistes.
                             Il n’y aurait donc plus d’espoir à court terme ? Si, peut être. Car autant pour l’aide au
                             développement que pour la réforme des institutions internationales, une voie semble
                             rester  ouverte.  Celle  de  la  mobilisation  directe  de  la  société  civile  mondiale,  et  de
                             l’opinion publique internationale, notamment à travers l’action des ONG.
                             Mais il faudrait pour cela redéfinir le rôle des ONG et créer des synergies vraiment
                             efficaces entre elles, dépassant leurs différences culturelles.
                             Les ONG sont réputées pouvoir se mobiliser et agir sur le terrain plus vite et plus
                             opportunément que les forces d’intervention intergouvernementales ou onusiennes.
                             Mais elles sont considérées par la plupart des Etats comme étant sans légitimité dé-
                             mocratique, et plus encore, comme étant souvent instrumentalisées par des tendances
                             partisanes, religieuses, politiques, ou idéologiques.

                             Cependant, si les ONG n’ont pas de légitimité démocratique au sens électoral classi-
                             que, elles sont en majorité à structure et à fonctionnement démocratiques, et malgré
                             leur caractère parfois partisan, la plupart peuvent avoir une légitimité différente, de
                             nature morale et civique, dans l’opinion publique.
                             Leur intérêt est donc aussi d’être des agents mobilisateurs efficaces d’opinion publi-
                             que, dont la crédibilité provient de leur action de terrain directement utile à la société
                             civile. Et l’intérêt de la société civile est dans une union mondiale arbitrale efficace.
                             Malheureusement, par expérience, de plus en plus d’ONG pensent qu’elles réussis-
                             sent  mieux  désormais  hors  du  cadre  des  Nations  Unies.  C’est  dommage,  car  à
                             l’intérieur du système des Nations Unies elles ont encore des opportunités officielles
                             de rencontre et de concertation. Si ce cadre est trop souvent inefficace, il n’est pas
                             complètement inutile.
                             Les ONG peuvent y organiser des campagnes coordonnées d’information et de sen-
                             sibilisation de l’opinion publique mondiale, sur les grands sujets qui nécessitent une
                             synergie internationale, notamment en ce qui concerne les problèmes de conflictuali-
                             té, de développement, et de gouvernance. D’où l’utilité aussi de la Conférence des
                             ONG qui relie les principales ONG en statut consultatif à l’ONU.

                             Mais que ce soit dans le cadre de l’ONU ou en dehors, pour ne pas être perdue dans
                             des campagnes de mobilisation déceptives, la crédibilité des ONG doit nécessaire-
                             ment être engagée à bon escient et pour des objectifs de réel intérêt général.

                             Là,  soyons  clairs :  il  faut  arrêter  de  se  focaliser sur  de faux  problèmes  climatiques
                             alors  que  l’essentiel  est  ailleurs.  Les  problèmes  de  famine,  de  mauvais  développe-
                             ment, et de conflictualité inter-humaine sont bien plus dangereux pour notre espèce
                             que les éventuels accidents environnementaux évoqués actuellement. Et la conflictua-
                             lité doit être résolue dans le cadre d’une nouvelle gouvernance mondiale, capable de
                             promouvoir un partage équilibré des ressources d’intérêt général.
                             Il  est  évidemment  normal  d’organiser  une  solidarité  mondiale  réactive  pour  nous
                             protéger mutuellement des conséquences des éventuelles catastrophes naturelles. Et
                             la bonne gestion environnementale, incluant la non-pollution du biotope, et le recy-
                             clage des matières utilisées, est une évidente nécessité. Mais il n’y a pas besoin pour
                             cela de faux semblants scientifiques ni d’alarmisme catastrophiste, à fortiori lorsque
                             cela accentue la conflictualité mondiale, et l’accaparement par les plus forts.
                             Par simple bon sens, il faut plutôt arrêter le chacun-pour-soi et la compétition sau-
                             vage permanente, et préférer la coopération et le partage équitable des ressources, le
                             meilleur  développement  passant  nécessairement  par  un  tel  partage,  et  de même la
                             paix mondiale.

                             Le développement mondial doit être solidaire et équitable, tiré par la mutualisation
                             des meilleurs moyens permettant l’adaptation permanente des collectivités humaines
                             aux aléas environnementaux et sociétaux, sans accaparement ou abus des ressources.


                  Conférence des ONG en statut à l’ONU /  Comité du Développement – Genève    Rapport de relance     Marc CARL    mai 2008        page 9
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