Page 155 - Annales EH 1998-2018
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Il est clair que la plupart des organisations écologistes et altermondialistes ont été ins-
                             trumentalisées pour alimenter la propagande alarmiste orchestrée par les lobbies poli-
                             tico-économiques occidentaux. Mais il y a une limite à partir de laquelle la surenchère
                             écolo-catastrophiste devient contre-productive pour cette propagande.
                             Surtout lorsque cela permet de contester publiquement le modèle économique domi-
                             nant en utilisant l’autorité morale apparente de l’ONU. Ce qui est pourtant dans la
                             logique de la situation.
                             En croyant pouvoir instrumentaliser facilement une mouvance contestataire occiden-
                             tale apparemment peu organisée et folklorique, marginale, ces lobbies ont ouvert une
                             boîte de Pandore d’où sont sortis les pires maux qu’ils pouvaient craindre.
                             Ils ont attiré cette mouvance en lui donnant un os à ronger, mais qu’elle ne lâchera
                             peut-être pas facilement après lui avoir trouvé bon goût. Derrière ses prétextes éco-
                             logistes, cette mouvance a comme cibles les modèles socio-culturels portés par les
                             occidentaux et le progrès industriel moderne. La créature peut mordre la main qui l’a
                             nourrie.
                             Les pays émergents commencent à compter les points, à distance, dans la nouvelle
                             partie qui oppose les principaux gouvernements et lobbies occidentaux aux écolo-
                             altermondialistes qui les contestent de l’intérieur. Ce qui pourrait paraitre une énorme
                             farce dans d’autres conditions est malheureusement à prendre très au sérieux dans les
                             conditions réelles du monde actuel.
                             Et cela débouche sur un autre problème relationnel mondial : les moyens, y compris
                             financiers, ne sont plus volontiers apportés par les grands contributeurs dont les inté-
                             rêts sont contrariés, et manquent pour alimenter l’action onusienne, dont le budget
                             annuel est seulement de quelques 12 milliards de dollars. Il en faudrait 3 ou 4 fois
                             plus pour atteindre ses objectifs officiels.
                             La désaffection devient telle que le programme du candidat Républicain à la Prési-
                             dence des USA en 2008, John Mac Cain, a prévu la création d’une nouvelle organisa-
                             tion internationale baptisée Ligue des Démocraties, devant supplanter l’ONU, consi-
                             dérée  désormais  comme  trop  inefficace  et  trop  perméable  aux  contestations  alter-
                             mondialistes et anti-occidentales.

                             Ayant des intérêts opposés, la Russie soutient l’ONU, et évite que son autorité soit
                             sapée. La Russie a proposé de financer le budget général de l’ONU à partir de 2010
                             pour une somme égale à ce qu’apportent les USA (500 millions $/an). Les parlemen-
                             taires russes, et l’église orthodoxe russe, s’impliquent de plus en plus dans les travaux
                             et les instances de l’ONU.

                             Pour sortir de ces jeux d’influence, qui empêchent les améliorations d’intérêt général,
                             des voies alternatives sont recherchées par d’autres entités de la communauté interna-
                             tionale. Une  proposition  particulièrement discutée est  la  création  d’une Assemblée
                             Parlementaire des Nations Unies, élue au suffrage universel, transformable ensuite en
                             Parlement  Mondial.  Une  telle  Assemblée  Parlementaire  ferait  contrepoids  à
                             l’Assemblée Générale des seuls exécutifs étatiques. Cette proposition a été introduite
                             par le Secrétaire Général de l’ONU Boutros Boutros-Ghali.

                             Une  Assemblée  Parlementaire  ayant  une  légitimité  et  une  représentativité  fortes
                             pourrait revendiquer des compétences législatives au plus haut niveau, donc être en
                             capacité institutionnelle de modifier le système de gouvernance des Etats, avec une
                             autorité supranationale arbitrale conduisant à la création d’un exécutif ad-hoc, c'est-à-
                             dire à un Gouvernement Mondial.

                             Mais  pour  en  arriver  là,  il  faudrait  que  les  Etats  existants  acceptent  d’organiser  la
                             création d’une autorité législative supranationale, avec des élections en conséquence,
                             et acceptent de se départir d’une partie de leur pouvoir pour le confier à cette struc-
                             ture commune mondiale supérieure. Cela ne semble pas envisageable dans la situa-
                             tion de méfiance, de concurrence, et d’accaparement, qui imprègne encore les rap-
                             ports des exécutifs politiques des Etats.

                  Conférence des ONG en statut à l’ONU /  Comité du Développement – Genève    Rapport de relance     Marc CARL    mai 2008        page 8
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