Page 89 - eco-savoirs pour tous
P. 89

Mais une autre hypothèse peut être, elle aussi, prise en considération.
               Elle dit que, tandis que la surface terrestre était soumise à un bombarde-
               ment d’astéroïdes, la vie aurait pu se maintenir dans un endroit plus tran-
               quille : les profondeurs océanes. Plusieurs chercheurs, stimulés par les
               hypothèses formulées par le microbiologiste américain Norman Pace,
               ont effectivement pensé que les premières formes de vie s’étaient peut-
               être abritées dans des sources hydrothermales océaniques. Découvertes
               en 1977 par un sous-marin de recherche au large des îles Galapagos, dans
               l’océan Pacifique, ces sources se forment à proximité des fractures de la
               croûte terrestre pleines de magma incandescent. L’eau de l’océan y pé-
               nètre et, quand elle arrive à ébullition, elle en ressort chargée de sels mi-
               néraux de toute nature, comme cela se passe dans un geyser.

                 Autour de ces sources vivent de riches colonies de bactéries thermo-
               philes (qui aiment la chaleur), capables d’utiliser pour leur subsistance les
               sels minéraux portés par les eaux chaudes. Ces bactéries forment à leur
               tour la base d’une chaîne alimentaire qui nourrit un grand nombre d’or-
               ganismes, parmi lesquels des mollusques, des vers géants, des homards
               aveugles, etc. La croûte terrestre primitive devait être encore assez mince
               pour que des sources de ce type aient existé çà et là dans les océans.
                 Le microbiologiste américain Carl Woese a fourni une confirmation in-
               téressante de cette hypothèse. Il savait que tous les organismes s’étaient for-
               més  à  partir  du  même  type  d’ancêtre,  puisque  tous,  des  bactéries  à
               l’Homme, partagent le même modèle de code génétique. Woese a étudié les
               rapports de parenté qui se situent aux racines de l’arbre du vivant, surtout
               chez les bactéries. Comparant le patrimoine génétique des différents types
               de bactéries, il a conclu que les formes les plus anciennes étaient précisé-
               ment celles qui vivaient dans les sources hydrothermales et dans les geysers.
                 Si elle n’est pas née dans un petit étang chaud, la vie pourrait donc être
               née (et avoir été protégée) dans un autocuiseur bouillant sous-marin. Ce-
               pendant, le fait qu'une vie ait pu être protégée du bombardement météo-
               rique par de fortes épaisseurs océanes n’exclut pas la possibilité qu’elle se
               soit formée auparavant plus en surface, et que les abîmes n’aient été pour
               elle qu’un de ses refuges, dont elle a pu ré-émerger plus tard.
                 Mais dans un cas comme dans l'autre, la plupart des scientifiques ont
               été  convaincus  que  l’origine  de  la  vie  avait  résulté  de  processus  chi-
               miques, donc déterministes, ce qui aurait deux conséquences. La pre-
               mière est qu’il s’agirait d’un processus relativement rapide, puisque cer-
               taines estimations évoquent un délai d’environ 10 millions d’années.



               Marc CARL                    Eco-Savoirs pour tous    rev.1.4 fr         © LEAI      89
   84   85   86   87   88   89   90   91   92   93   94