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Cela définissait des organismes simples, mais assez stables et robustes,
               pour qu’au cours de millions d’années, à travers une sélection de type dar-
               winien, ils aient eu la possibilité de perfectionner leurs voies métaboliques.
               L’une de ces voies était la capacité de synthétiser l’ATP (l’adénosine triphos-
               phate),  la  molécule  qui  aujourd’hui  encore  est  le  principal  transporteur
               d’énergie dans les organismes, puis l’AMP (l’adénosine monophosphate),
               l’un des principaux messagers à l’intérieur de la cellule, qui est aussi un cons-
               tituant chimique de l’un des quatre nucléotides qui constituent l’ARN.
                 Au fil du temps, dans l’une de ces protocellules chargées d’AMP, il peut
               s’être produit un accident : des nucléotides se formèrent, puis à l’aide d’en-
               zymes  présentes  dans  la  cellule,  s’unirent  pour  former  une  molécule
               d’ARN, qui commença à se répliquer. En d’autres termes, il se produisit ce
               qui devait se répéter quelques milliards d’années plus tard dans le labora-
               toire de Manfred Eigen. Cette hypothèse permet d’éviter les problèmes
               que pose une synthèse spontanée, impliquant l’absence d’enzymes dans les
               premiers nucléotides. Dans un premier temps, l’ARN ainsi formé dut donc
               se comporter comme un parasite, utilisant les nucléotides synthétisés par
               la cellule pour fabriquer des copies toujours nouvelles de lui-même.

                 Des copies, rappelons-le, qui luttaient entre elles, tout en améliorant
               progressivement leur capacité à se répliquer. Mais au fil du temps, comme
               cela a lieu très souvent dans les rapports entre un parasite et son hôte, les
               deux organismes améliorèrent probablement leurs relations, au point de
               devenir utiles l’un à l’autre. Ainsi, l’ARN se chargea de répliquer avec une
               plus grande  efficacité  l’appareil métabolique protéique, tandis  que  les
               protéines  se  chargèrent  de  répliquer  avec  une  plus  grande  précision
               l’ARN, et plus tard la molécule très semblable qui prit sa place, l’ADN.
               Une telle évolution par parasitisme et symbiose est utilisée aussi par la
               biologiste américaine Lynn Margulis pour expliquer l’origine de la cellule
               eucaryote moderne, en précisant que ce phénomène se serait apparem-
               ment reproduit partout au cours de l’histoire biologique.
                 Quoi qu’il en soit, ces recherches sur l’origine de la vie avaient commencé
               à partir de présupposés proches de ceux rappelés par Charles R. Darwin
               (1809-1882) au 19  siècle, qui disait que la vie naissait dans un petit étang
                              ème
               tiède, c’est-à-dire à partir d’une concentration locale de matière organique en
               phase aqueuse, dans laquelle un mélange des molécules appropriées trouvait
               par hasard une façon de donner vie à une micro-entité capable d’absorber
               des nutriments, de croître et de se multiplier, en prenant ensuite tout son
               temps pour améliorer progressivement son fonctionnement, jusqu’à devenir
               ce miracle de complexité et de perfection qu’est une cellule vivante.


               Marc CARL                    Eco-Savoirs pour tous    rev.1.4 fr         © LEAI      87
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