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Voyons plus en détail ce processus, en commençant par le fait que dans
toutes les cellules observées, les fonctions métaboliques sont assurées par
des protéines (complexes moléculaires), alors que les fonctions génétiques le
sont par des acides nucléiques (ADN et ARN, esthers phosphoriques). La
construction des acides nucléiques nécessite des enzymes spéciales, qui sont
aussi des protéines, tandis que pour la construction des protéines, il faut les
instructions contenues dans les acides nucléiques. Le système métabolique
est donc indispensable pour créer le système génétique, et réciproquement.
Mais lequel est apparu en premier ? Et comment y est-il parvenu sans
l’aide de l’autre ? Pendant longtemps, le problème majeur de l’origine de la
vie a tourné autour de ces deux questions, comme dans la précession de
l’œuf et de la poule. Et presque toutes les théories et les modèles traitant
de l’origine de la vie se sont d’abord basés sur l’origine première soit du
métabolisme, soit du système génétique. Un premier modèle convainquant
pouvant expliquer l’origine de la vie avait été élaboré par le savant russe
Aleksandr Oparin (1894-1980) en 1924, faute de mieux, alors que la biolo-
gie moléculaire n’était pas encore née. Ce modèle a présupposé le métabo-
lisme, et plus précisément la cellule, comme point de départ.
Mais ça ne réglait pas pour autant le problème global. Pour que se crée
un système métabolique, des protéines doivent d’abord se former, tandis
que pour qu’un système génétique se crée, des acides nucléiques doivent
d’abord se former. Les protéines sont de longues chaînes associant vingt
types d’acides aminés différents, et les acides nucléiques sont de longues
chaînes formées de quatre types de nucléotides différents. Or, puisque ni
les acides aminés ni les nucléotides ne se forment spontanément, le pro-
blème de l’origine de la vie résidait encore dans un processus chimique qu’il
fallait évidemment identifier et comprendre.
L’un des premiers jalons forts sur cette voie fut une expérience menée
en 1953 à l’université de Chicago par le jeune biochimiste Stanley L. Mil-
ler. Dans une ampoule de verre contenant de l’eau et un mélange gazeux
(hydrogène, méthane, ammoniac et vapeur d’eau), semblable à celui qui
pouvait être présent dans l’atmosphère primitive, Miller provoqua pen-
dant trois jours de puissantes décharges électriques, pour simuler l’effet
de la foudre. À sa surprise, il se forma dans l’ampoule un riche mélange
d’acides aminés. Cette expérience, et d’autres qui suivirent en utilisant
des mélanges un peu différents et d’autres formes d’énergie (par exemple
des radiations ultraviolettes) démontrèrent qu'une formation d’acides
aminés avait sans doute pu être auto-générée d’une manière similaire
dans les conditions de la Terre primitive.
Marc CARL Eco-Savoirs pour tous rev.1.4 fr © LEAI 79