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Pour cela, ils devaient faire une séparation habile entre la doxa et les
connaissances plus certaines que l’observation, la réflexion rationnelle et
la déduction logique leur permettaient d’atteindre, c’est-à-dire ce qu’ils
appelaient l’epistêmê. Et c’est aussi dans cet esprit que se développa la
science grecque antique, dont on peut situer les débuts historiques cer-
tains à l’époque où furent réalisées les travaux et les premières théories
des naturalistes ioniens, qui exerçaient entre 650 et 500 avJC.
Les précurseurs les plus connus ont été ceux de l’école de Milet, c’est-à-
dire Thalès (625-547 avJC), Anaximandre (610-546 avJC) et Anaximène
(585-525 avJC). Sous l'appellation de physiciens naturalistes, ils tendaient à
s’opposer aux certitudes des prêtres et des théologiens d’alors, en considé-
rant qu’on pouvait amener plus rationnellement la nature à révéler ses se-
crets, et à en tirer parti. Un objectif important de leur recherche consistait à
identifier les principes qualifiants, la substance, et l’essence, dont toutes
choses tiraient leur origine. Ils s’efforçaient aussi de trouver l’unité (ou le
Principe, l’Archè) à l’origine de la diversité du monde perceptible.
Pour Thalès, par exemple, le principe initial était l’eau ; pour Anaxi-
mandre, c’était une substance première indéfinie (l’apeiron) ; et pour Anaxi-
mène, c’était l’air. Ces présupposés se conformaient de façon suggestive aux
théories cosmologiques et cosmogoniques qui prévalaient alors, et qui ont
constitué jusqu’à Ptolémée la cosmologie traditionnelle grecque. Une excep-
tion cependant était l’apeiron d’Anaximandre, un héritage de représentations
cosmiques védiques, conceptuellement très en avance sur ce que la science
moderne découvrira ensuite sur l’origine et la consistance de l’univers.
Mais pour le reste, parce qu’ils étaient encore rudimentaires, opposés,
et différemment interprétables, plusieurs de ces principes furent soumis à
des critiques de la part des philosophes des générations suivantes. Au 5
ème
siècle, Empédocle d’Agrigente (492-430 avJC) leur préféra une théorie dite
des quatre éléments, qui aura un développement ultérieur notable. Pour
Empédocle, en effet, toutes les choses étaient formées de quatre éléments
premiers, l’air, l’eau, la terre et le feu, qui se combinaient en diverses pro-
portions. Dans sa conception, ces quatre éléments interagissaient les uns
avec les autres par des attractions et des répulsions, conçues comme des
manifestations respectivement d’amour et de haine, et ces attractions et
répulsions permettaient d’expliquer les changements des choses.
Au 5 siècle avJC, les outils physico-mathématiques grecs étaient donc
ème
déjà bien développés pour l’époque, synthétisant des bases indo-européennes
de source védique avec divers emprunts égyptiens, assyriens et babyloniens.
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