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Elles furent aussi reprises plus tard par le latin Lucrèce (98-55 avJC).
               Bien qu'elles aient été à plusieurs époques attaquées et condamnées, parce
               que jugées matérialistes, athées, voire immorales, l’atomisme durera, jusqu’à
               inspirer finalement d'importantes découvertes de la physique moderne.
                 Après Démocrite, intervint Aristote (384-322 avJC), dont la pensée, et
               celle de ses disciples, allaient constituer un important point de référence
               pour presque tous les savants jusqu’au début du 17 ème  siècle. La doctrine
               aristotélicienne  constitua la première grande  tentative d’organisation de
               tous les aspects du savoir, s'appliquant depuis le monde humain naturel
               jusqu'au cosmos pris dans son ensemble, en passant par les aspects les plus
               abstraits de la logique et de la méthode scientifique.
                 Les principes explicatifs de la physique et de la métaphysique aristoté-
               liciennes étaient exprimés sous la forme de dichotomies, telles que ma-
               tière/forme, puissance/acte, et substance/accident. La matière du monde
               sublunaire  (terrestre)  y  était  supposée  constituée,  comme  selon  Empé-
               docle, de quatre éléments, ou essences : l’eau, l’air, la terre, et le feu. La
               matière des sphères célestes y était constituée par une quintessence (ou 5
                                                                          ème
               élément), l’éther. Et la forme était ce qui permettait d’identifier les objets
               matériels, ce qui leur assignait une spécificité et une individualité. Tout ob-
               jet existant était donc une unité indivise de matière et de forme, précisé-
               ment parce qu’il était telle chose et pas une autre.
                 De là, connaître les choses impliquait de connaître ce qui faisait partie
               de leur essence et de leur substance. Tout ce qui n’appartenait pas d’une
               façon nécessaire à cette substance (c’est-à-dire ce qui ne distinguait pas
               un objet en tant que propriété essentielle de cet objet) était un accident
               (par exemple le fait qu’un Homme soit blond ou brun). Et la signification
               du mot qui désignait une chose découlait du concept qui permettait de
               l’identifier selon ses propriétés essentielles.
                 C’est pour cette raison qu’il était important pour Aristote de classer
               les choses selon leurs noms, leurs différences, et leurs propriétés essen-
               tielles. Mais les objets changeaient : un enfant devenait adulte, une fleur
               se transformait en fruit, l’eau se transmutait en glace, même le mouve-
               ment dans l’espace était un type particulier de changement. Une grande
               interrogation était alors de savoir comment comprendre le changement.
               En réponse, l’axiome de base de l’interprétation aristotélicienne du chan-
               gement était que si un objet ou l’un de ses aspects se transformait, le
               résultat de cette transformation était déjà présent en puissance dans l’ob-
               jet même. Ce que l’objet était devenu, c’était l’objet en acte, et par con-
               séquent, c’était aussi ce que l’objet était en puissance auparavant.


               Marc CARL                    Eco-Savoirs pour tous    rev.1.4 fr         © LEAI      363
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