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Ces mythes originels ont été reformulés, et développés de manière plus
logique, par les anciens grecs, héritiers de traditions védiques, syncrétisées
avec des apports levantins. Par exemple, comme les babyloniens, l’ionien
Thalès de Milet (625-547 avJC), auquel la tradition fait remonter l’origine de
la pensée rationnelle grecque, considérait l’eau comme une substance pri-
mordiale. Ne pouvant pas dépasser les connaissances limitées de son
époque, il avait cherché une explication générale aux transformations de
l’eau, qui pouvait devenir gaz par évaporation, ou solide par congélation.
Tous les états connus de la matière, concluait Thalès, tiraient leur modèle de
l’eau. Mais ses disciples avaient révisé ensuite cette réflexion imparfaite.
Anaximandre (610-546 avJC) proposait magistralement un principe in-
temporel et illimité, l’apeiron, et d’autres disciples de Thalès, notamment
Anaximène (580-528 avJC), concevaient une cosmologie des opposés, qui
trouva ensuite en Héraclite (541-480 avJC) son plus grand théoricien, tan-
dis qu’Anaxagore (500-428 avJC) introduisait une notion de minuscules
grains incréés et indestructibles (a-tomes), dont les interactions, mues par
un esprit extérieur, expliquaient l’évolution de la matière. Empédocle
d’Agrigente réduisit le nombre infini de graines d’Anaxagore à quatre
atomes de base. Et il abandonna l’idée d’un esprit interactif extérieur, en
expliquant la chimie par deux caractéristiques qui réglaient l’interaction des
atomes et de leurs composés : la philia, l’attirance, et la neixos, la répulsion.
La philia tendrait à faire se combiner les atomes, alors que la neixos, au
contraire, tendrait à les séparer. Empédocle peut être considéré par là
comme le père de la première théorie de l’affinité chimique.
De leur côté, Démocrite (460-370 avJC) et Leucippe peuvent être
considérés comme des précurseurs audacieux de la première théorie phy-
sique atomiste. Les atomes, soutenaient-ils, se mouvaient au hasard dans
l’espace vide. Leurs chocs, fortuits, donnaient naissance à différentes
combinaisons. Pour Démocrite, ces combinaisons étaient possibles parce
que des atomes différents avaient une géométrie différente. Ces théories
matérialistes, qui atteignirent leur forme la plus achevée avec Leucippe et
Démocrite, ont été incluses, mais non abandonnées, dans la pensée de
Platon (428-347 avJC), puis dans celle d’Aristote (384-322 avJC), dont la
pensée prévaudra durant les deux millénaires suivants.
Pendant cette période, aucune théorie de la science, et donc aucune
théorie de la chimie, n’a pu surpasser l’influence de la théorie d’Aristote.
Pour ce Stagirite, il n’y avait pourtant pas d’atomes, et pas de vide, mais une
matière primordiale, où existaient quatre éléments fondamentaux (feu, air,
eau et terre) et quatre qualités fondamentales (chaud, froid, sec et humide).
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