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C’est ainsi que l’on a réalisé, probablement par hasard, un alliage métal-
          lique qui présentait un double avantage par rapport au cuivre : il était plus
          dur, et d’autant plus facile à travailler que son point de fusion était plus bas.
          Puis on a découvert le plomb, et surtout le fer, que les Égyptiens appelaient
          baa-en-pet (fer du ciel), puisque le premier fer utilisé en Mésopotamie et
          en Égypte aurait été extrait de météorites, tombées effectivement du ciel.
             L’ensemble de ces activités chimiques a induit progressivement une
          spécialisation. Et puisque la technologie des métaux revêtait aussi une im-
          portance militaire croissante, les spécialistes en métallurgie sont devenus
          une classe non seulement reconnue, mais puissante. Aussi bien en Méso-
          potamie qu’en Égypte, des dieux associés aux métaux ont fait l’objet d’une
          adoration particulière, et les hommes capables de travailler ces matières
          étaient parfois jugés dignes d’entrer dans la caste privilégiée des prêtres.
             Mais d'où venaient de telles matières ? Bien que le développement véri-
          tablement scientifique de la chimie ait commencé beaucoup plus tard, (entre
          le 16  et le 17  siècles), une histoire précursive avait accompagné, et par-
              ème
                      ème
          fois précédé, divers progrès, notamment en métallurgie. Car les plus an-
          ciennes théories chimiques ont découlé d’une recherche des origines de la
          matière,  et  accessoirement  d’une  tentative  d’explication  de  l’origine  du
          monde. En effet, la plupart des peuples antiques s’aperçurent très tôt qu’il
          existait deux possibilités : ou bien le monde avait été créé tel quel ex-nihilo,
          depuis le néant, ou bien il devait son origine à une substance préalable. Dans
          ce cas, il avait certainement connu une série de transformations, dont les
          traces étaient recherchées, pour expliquer notamment les divers métaux.

             Les juifs, puis leurs hybrides religieux abrahamiques, avaient choisi l’hy-
          pothèse d’un dieu qui aurait créé tels quels le Ciel et la Terre à partir du
          néant. Mais le néant était raisonnablement difficile à concevoir, et à ad-
          mettre comme substance primordiale. D’autres peuples ont donc opté plu-
          tôt pour l’hypothèse d’une substance primordiale indéfinie, et intempo-
          relle. Mais quelle que soit la confiance que l’on avait dans les capacités de
          la matière à se transformer, il était difficile de rendre compte, en partant
          d’une même substance d’origine, des oppositions constatées dans la nature,
          entre le chaud et le froid, l’humide et le sec, la lumière et l’obscurité.
             C’est pourquoi jadis, en extrême Orient, ainsi qu’en Mésopotamie, en
          Égypte, et en Grèce, l’origine du monde avait été expliquée en partie par
          des cosmologies d’opposition et de complémentarité, dans lesquelles on
          faisait intervenir plusieurs substances originelles, mues selon des théories
          d’interactions devenant de plus en plus complexes.



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