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4) chaque nouvelle espèce se forme dans une partie réduite de l’aire
          de distribution de l’espèce ancestrale, de préférence dans une zone péri-
          phérique et isolée.
             Mais en opposition à cette théorie des équilibres ponctués, les tenants
          du gradualisme soutenaient que, en général, les A se modifiaient graduel-
          lement dans le temps, donnant naissance aux B, que cette transformation
          était lente, et qu’elle impliquait toute la population originale des A.
             Une autre différence substantielle entre les deux théories résidait aussi
          dans les taux d’évolution, pendant et entre les événements de spéciation.
          Dans le cas du gradualisme, le taux était constant au cours du temps.
          Pour les tenants des équilibres ponctués, ce taux était plus élevé au mo-
          ment de la subdivision de la ligne évolutive, tandis que, entre les événe-
          ments de spéciation, le changement évolutif était très réduit ou inexistant,
          pendant une période que Eldredge et Gould appelaient stase évolutive.
             Leur controverse a eu le mérite de stimuler plusieurs études visant de
          façon sérieuse à étayer l’une ou l’autre théorie. Il reste encore beaucoup
          de travail à faire pour éclaircir les mécanismes macroévolutifs, mais la
          stimulation intellectuelle induite par ces deux théories différentes reste
          riche en perspectives et en éclaircissements. Ce qui peut aller finalement
          au bénéfice d'une meilleure compréhension de l’histoire évolutive géné-
          rale du vivant, y compris humaine, et dans l'intérêt général.

             Car puisque l'étude de la macroévolution permet de déterminer les taux
          d’évolution et les mécanismes producteurs de changement, cela implique
          une définition préalable probante des modalités selon lesquelles les transi-
          tions entre les grands groupes d’animaux s'opèrent. Le traçage probant des
          mammifères et des oiseaux à partir des reptiles, de la conquête de la terre
          ferme par les amphibiens et les plantes terrestres, l’évolution d’organismes
          pluricellulaires  à  partir  d’organismes  unicellulaires,  devraient  donc  per-
          mettre d'éclairer les modalités par lesquelles la vie a atteint successivement
          sa richesse actuelle, jusqu’à pouvoir en extrapoler des tendances futures.
             À  la  recherche  de  cette  précision, une  thématique  intéressante  des
          études  de  macroévolution  a  porté  sur  le  phénomène  de  coévolution,
          terme par lequel se caractérise une évolution interdépendante de deux es-
          pèces ayant une relation écologique probante, et qui tirent réciproque-
          ment bénéfice de leurs interactions. On peut citer le cas d’une espèce de
          fourmi largement répandue en Europe (Formica fusca) qui utilise comme
          nutriment une substance produite par un organe particulier d’un autre in-
          secte qui semble ne produire cette sécrétion que pour nourrir la fourmi.


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