Page 396 - eco-savoirs pour tous
P. 396

Mais on pouvait le faire artificiellement. Carnot s’était aperçu qu’une
          machine thermique pouvait aussi fonctionner dans le sens inverse. On
          pouvait, autrement dit, appliquer du travail mécanique pour faire monter
          la chaleur d’une source froide à une source chaude, et utiliser ainsi entre
          deux corps une différence de température qui auparavant n’existait pas
          (c’est selon ce principe que fonctionneront plus tard les réfrigérateurs).
             Sa conclusion était qu’en disposant d’une différence de température,
          on pouvait produire du travail mécanique, et qu’inversement, avec du
          travail mécanique, on pouvait créer une différence de température. Avec
          la formulation de cette nouvelle notion d’énergie, il fut clair que le travail
          produit par une machine thermique résultait de la conversion d’une quan-
          tité de chaleur équivalente. La chaleur se transformait en travail. Et de là,
          puisque la chaleur était une forme d’énergie comme les autres, les deux
          physiciens  Rudolf  Clausius  (1822-1888)  et  William  Thomson  (1824-
          1907), lequel fut anobli par la suite en Lord Kelvin pour ses mérites scien-
          tifiques, théorisèrent cette propriété, pour essayer d'aller plus loin que la
          seule loi de la conservation de l’énergie, encore insuffisante pour expli-
          quer le fonctionnement plus complexe des machines.
             Il leur fallait démontrer l’applicabilité d’une autre loi physique, que
          l’on appellera ensuite la deuxième loi de la thermodynamique. Cette loi
          devait établir que la température ne pouvait pas passer spontanément du
          froid au chaud (dans la version de Clausius), et qu’il n’était pas possible
          de produire du travail en refroidissant un corps au-dessous de la tempé-
          rature du milieu environnant (dans la version de Thomson). En d’autres
          termes,  il  fallait  établir  que  certains  processus  physiques,  considérés
          comme de première espèce, étaient naturels et spontanés, comme par
          exemple la dissipation d’énergie mécanique par frottement, et la produc-
          tion de chaleur qui s’ensuivait, ou le passage de chaleur de la température
          la plus élevée à la température la plus basse. Au contraire, d’autres pro-
          cessus dits de deuxième espèce, opposés aux précédents, et relatifs à la
          production d’énergie mécanique par consommation de chaleur, ou au
          passage de chaleur depuis des corps à température basse vers des corps
          à la température plus élevée, ne se produisaient pas spontanément dans
          la nature, mais seulement dans des conditions provoquées.

             Le fait est que, pour qu’un processus de deuxième espèce se produise,
          il fallait exploiter (comme l’avait dit Carnot) un processus spontané de
          première espèce. C’est pourquoi, si l’on n’exploitait pas la tendance spon-
          tanée de la chaleur à équilibrer des différences de température, une ma-
          chine thermique ne pouvait pas fonctionner.


          396                                        Eco-Savoirs pour tous    rev.1.4 fr        © LEAI        Marc CARL
   391   392   393   394   395   396   397   398   399   400   401