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Mais on pouvait le faire artificiellement. Carnot s’était aperçu qu’une
machine thermique pouvait aussi fonctionner dans le sens inverse. On
pouvait, autrement dit, appliquer du travail mécanique pour faire monter
la chaleur d’une source froide à une source chaude, et utiliser ainsi entre
deux corps une différence de température qui auparavant n’existait pas
(c’est selon ce principe que fonctionneront plus tard les réfrigérateurs).
Sa conclusion était qu’en disposant d’une différence de température,
on pouvait produire du travail mécanique, et qu’inversement, avec du
travail mécanique, on pouvait créer une différence de température. Avec
la formulation de cette nouvelle notion d’énergie, il fut clair que le travail
produit par une machine thermique résultait de la conversion d’une quan-
tité de chaleur équivalente. La chaleur se transformait en travail. Et de là,
puisque la chaleur était une forme d’énergie comme les autres, les deux
physiciens Rudolf Clausius (1822-1888) et William Thomson (1824-
1907), lequel fut anobli par la suite en Lord Kelvin pour ses mérites scien-
tifiques, théorisèrent cette propriété, pour essayer d'aller plus loin que la
seule loi de la conservation de l’énergie, encore insuffisante pour expli-
quer le fonctionnement plus complexe des machines.
Il leur fallait démontrer l’applicabilité d’une autre loi physique, que
l’on appellera ensuite la deuxième loi de la thermodynamique. Cette loi
devait établir que la température ne pouvait pas passer spontanément du
froid au chaud (dans la version de Clausius), et qu’il n’était pas possible
de produire du travail en refroidissant un corps au-dessous de la tempé-
rature du milieu environnant (dans la version de Thomson). En d’autres
termes, il fallait établir que certains processus physiques, considérés
comme de première espèce, étaient naturels et spontanés, comme par
exemple la dissipation d’énergie mécanique par frottement, et la produc-
tion de chaleur qui s’ensuivait, ou le passage de chaleur de la température
la plus élevée à la température la plus basse. Au contraire, d’autres pro-
cessus dits de deuxième espèce, opposés aux précédents, et relatifs à la
production d’énergie mécanique par consommation de chaleur, ou au
passage de chaleur depuis des corps à température basse vers des corps
à la température plus élevée, ne se produisaient pas spontanément dans
la nature, mais seulement dans des conditions provoquées.
Le fait est que, pour qu’un processus de deuxième espèce se produise,
il fallait exploiter (comme l’avait dit Carnot) un processus spontané de
première espèce. C’est pourquoi, si l’on n’exploitait pas la tendance spon-
tanée de la chaleur à équilibrer des différences de température, une ma-
chine thermique ne pouvait pas fonctionner.
396 Eco-Savoirs pour tous rev.1.4 fr © LEAI Marc CARL