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Le stimulus de déclenchement pouvait être une image, une odeur, ou
          une action d’un autre animal, mais il existait une correspondance précise
          entre le stimulus et la réponse. Les recherches de Tinbergen montrèrent
          effectivement que l’épinoche mâle réagissait de façon plus agressive à un
          modèle grossier d'un autre mâle au ventre coloré de rouge, plutôt qu’à
          une reproduction plus exacte n’ayant pas la même coloration.
             Cela signifiait en l'occurrence qu'un tel stimulus chromatique instinc-
          tif prévalait sur une identification précise. Les recherches de Tinbergen
          aboutirent à la publication de The Study of Instinct, en 1951. Le chercheur,
          après avoir enseigné la zoologie expérimentale à Leiden (où il rencontra
          Lorenz à un congrès sur l’instinct), alla à l’Institut de zoologie de Munich,
          puis revint à Leiden, où il fonda une école dédiée à l’étude du comporte-
          ment animal. Dans son livre, Tinbergen illustra le point de vue selon le-
          quel l’instinct était un mécanisme du système nerveux, organisé hiérar-
          chiquement, capable de garantir la survie de l’organisme porteur, car il
          gardait la possibilité de répondre efficacement à des stimuli externes et
          internes, selon une expérience pré-codée.
             Tinbergen étudia aussi le sens des parades, nuptiales ou de conquête de
          suprématie, au sein de certains groupes, liées par exemple aux habitudes
          sociales des mouettes, ou à l’accouplement des épinoches. En 1954, il ré-
          capitula  finalement  les  trois  éléments  nécessaires  qu’il  distinguait  dans
          l’éthologie moderne. Le premier élément était un recours nécessaire à une
          description préalable du comportement observable, comme base indispen-
          sable pour la formulation des hypothèses. Le deuxième était la nécessité de
          travailler sur des schémas comportementaux globaux, multifactoriels. Le
          troisième était la nécessité d’y situer les trois facteurs bio-adaptatifs fonda-
          mentaux, c’est-à-dire la causalité, la valeur de survie, et l’évolution.
             Des travaux de I. Eibl-Eibesfeldt et de W. H. Thorpe, auteur de The
          Study of Instinct in Animals, publié en 1957, ont confirmé cela au cours des
          années 1950. Dans le même temps, d’autres études commençaient à dé-
          montrer qu’à la base de phénomènes tels que l’adoption ou l’abandon d’un
          certain comportement, pouvaient intervenir aussi des médiateurs biochi-
          miques, plus ou moins polyvalents. C’est ainsi que l’on découvrit que des
          glandes productrices d’hormones responsables de la mue réglaient égale-
          ment le comportement grégaire. Sur la base des recherches de von Frisch
          sur la danse des abeilles, et en particulier grâce à la contribution de R. Jan-
          der, en 1957, on découvrit que d’autres animaux que les abeilles disposaient
          eux aussi d’un système assez fonctionnel pour s’orienter dans l’exploration
          du territoire, et pour retrouver, ensuite, la voie du retour.

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