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La seule explication qu’il parvint à trouver fut que le mouvement à
               travers l’éther produisait sur les corps matériels des effets (par exemple
               la contraction de leur longueur dans la direction du mouvement) qui em-
               pêchaient une révélation expérimentale. C’était une conclusion étrange :
               il y avait quelque chose qui se produisait, mais qui ne pouvait en aucun
               cas être observée expérimentalement. En fait, c’était comme si dans le
               passage du système de référence de l’éther au système de référence du
               laboratoire, il fallait appliquer des transformations de coordonnées par-
               ticulières (qui furent ensuite appelées transformations de Lorentz), qui
               reflétaient l’action de l’éther sur les corps en mouvement.
                 Mais ces conclusions ne satisfaisaient pas un jeune physicien, Albert
               Einstein (1879-1955), qui travaillait à l’office des brevets de Berne. Il avait
               des doutes sur l’existence même de l’éther, notamment parce que les re-
               cherches qu’il avait effectuées sur les phénomènes d’émission et d’absorp-
               tion de la lumière par la matière l’avaient convaincu que la lumière devait
               avoir  une  nature  corpusculaire,  comme  le  pensait  Newton.  En  même
               temps, il était convaincu que le principe de relativité (c’est-à-dire l’impos-
               sibilité de découvrir un système de référence en repos absolu, et l’équiva-
               lence qui s’ensuivait de tous les systèmes de référence en mouvement rec-
               tiligne et uniforme l’un par rapport à l’autre) avait une validité fondamen-
               tale. Einstein se fixa donc comme objectif de concilier le principe de rela-
               tivité avec la thèse de Lorentz, selon laquelle la vitesse de la lumière était
               indépendante de la vitesse de la source qui l’émettait. La seule façon de le
               faire consistait à remettre en cause les anciennes idées d’espace et de temps.
                 Il lui fallait d’abord redéfinir le concept de simultanéité entre des évé-
               nements distants les uns des autres, et ensuite redéfinir le concept de la
               longueur d’un corps en mouvement par rapport au système de référence
               dans lequel ce corps était observé. De cette façon, on vérifiait les transfor-
               mations de Lorentz, non pas comme effet physique du mouvement à tra-
               vers l’éther, mais comme effet d’une nouvelle cinématique fondamentale,
               fondée précisément sur la révision des concepts d’espace et de temps. Les
               conséquences de la nouvelle théorie étaient peu intuitives, et dans certains
               cas déroutantes. C’est pourquoi elle eut beaucoup de mal à s’affirmer dans
               la communauté des physiciens. Il fallait en effet leur faire admettre :
                 - que la simultanéité entre deux événements ne pouvait pas être con-
               sidérée comme absolue, mais seulement comme relative au système de
               référence dans lequel les événements étaient observés ;
                 - que la vitesse de la lumière avait la même valeur dans tout système
               de référence (c’est-à-dire qu’elle était une constante universelle) ;


               Marc CARL                    Eco-Savoirs pour tous    rev.1.4 fr         © LEAI      411
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