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Puis certains esprits se sont réveillés, surtout lors de la Renaissance euro-
péenne, jusqu’à ce que, par réaction à cette tendance trop mécaniste, le géo-
logue James Hutton (1726-1797), inspiré par l’analogie entre la circulation
sanguine de notre corps et la circulation de l’eau sur la planète, propose une
représentation de la Terre comme un supra-organisme quasi-vivant, dans
une approche physiologiste presque comparable à celle de la médecine, et
considérée depuis comme un fondement de l’écologie scientifique.
Il s’agissait d’une vision rupturielle, impliquant une analyse du milieu
naturel dans une logique de complémentarité systémique globale, diffé-
rente de l’esprit restrictif et réductionniste des sciences de l’époque, parti-
culièrement spécialisées, sectorielles, et sensibles au conformisme religieux.
Ce qui ne signifiait pas que tout ce qui était réductionniste était mauvais, et
que tout ce qui était global était bon, mais que la science analysait dès lors
avec moins de dogmatisme la pertinence respective de ces approches.
Et c’est justement à partir de cette question d’équilibre pertinent, ap-
pliqué à l’équilibre général de la nature, qu’au milieu du 18 ème siècle, le
naturaliste suédois Carl von Linné a commencé à consolider les premières
fondations de ce qui allait devenir l’écologie moderne. A son époque, une
nouvelle tendance à rechercher l’équilibre et la globalité des phénomènes
biologiques était confortée par de grands voyages d’exploration et de re-
cherche des européens, qui favorisaient les progrès des analyses de type
écologique, même si à l’origine, ils avaient surtout pour but de conquérir
de nouvelles terres à la recherche de plus de ressources géo-stratégiques.
Alexander von Humboldt (1769-1859), naturaliste et géographe alle-
mand, ami de Goethe, compte parmi ceux qui, entre le 18 ème et le 19 ème
siècles, par leurs travaux, ont contribué le plus nettement aux progrès de
l’écologie. Avant de partir pour une expédition de cinq ans en Amérique
centrale et en Amérique du Sud, von Humboldt avait écrit à son ami Karl
Freiesleben en 1799 : je tâcherai de découvrir l’interaction entre les forces de la
nature et les influences exercées par le milieu géographique sur la vie végétale et
animale. Autrement dit, je me propose d’explorer l’unité de la nature.
Après son retour de ce long voyage, von Humboldt écrit encore : dans
la forêt amazonienne aussi bien que sur les hautes cimes des Andes, j’ai toujours
été conscient qu’une seule haleine, d’un pôle à l’autre, donne aux roches, aux
plantes, aux animaux, et au cœur de l’Homme, une seule et même vie.
L’œuvre de ce célèbre géographe a été caractérisée par une vision glo-
bale de la nature, qui confortait les contributions préalables de Linné et
Hutton, et qui préparait le terrain à Charles Darwin.
Marc CARL Eco-Savoirs pour tous rev.1.4 fr © LEAI 17