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Le fait de tenter une mesure n’y changeait rien, puisque l’appareil d’ob-
               servation perturbait le système, et qu’on ne pouvait pas affirmer qu’une
               grandeur avait, juste avant d’être mesurée, la valeur qui était trouvée. Cet
               aspect non déterministe de la physique quantique n’a pas été accepté faci-
               lement par tous les physiciens de l’époque, et en particulier il indisposait
               Albert Einstein, qui disait ne pas croire que Dieu jouait aux dés.
                  Des physiciens opposants à l’école de Copenhague pensaient pour leur
               part qu’une telle formulation sous forme de probabilités était utilisable,
               mais faute de mieux, et qu’un jour, on découvrirait de nouvelles propriétés
               physiques qui permettraient de revaloriser le déterminisme, en les libérant
               de la nécessité d’utiliser les probabilités. Ils spéculaient sur l’existence de
               variables cachées que l’esprit humain ne connaîtrait pas encore, mais qu’il
               découvrirait un jour. Cela faisait sens, car notamment sous le nom de pa-
               radoxe EPR, Einstein avait lui-même décrit une possible situation dans
               laquelle l’existence de variables cachées lui semblait plausible.

                 Or, des expériences réalisées par Alain Aspect dans les années 1980 ont
               penché en faveur de la théorie quantique, mais sans présumer l'existence
               de variables cachées. Il rappelait par ailleurs que dans le modèle de Bohr
               de l’atome d’hydrogène, l’électron était décrit sur une trajectoire circulaire
               de rayon déterminé, ce qui n’était pas compatible avec la mécanique quan-
               tique, où cette notion de trajectoire était dénuée de sens.

                 Pour mieux comprendre cela, reprenons le cas de la mesure de la position
               d’un électron dans un atome par rapport à son noyau. Avant de faire la me-
               sure, on sait que l’électron peut se trouver en n’importe quel point de l’es-
               pace, et pour chaque point on connaît la probabilité d’y trouver l’électron.
               La probabilité qu’il se trouve à une distance du noyau inférieure au rayon de
               l’orbite circulaire de Bohr est environ égale à 1/3 et il n’y a qu’une chance
               sur 100 de le trouver à une distance supérieure à quatre fois le rayon de l’or-
               bite de Bohr. Il est donc plus commode de représenter globalement l’élec-
               tron comme formant un nuage de charge négative autour du noyau, même
               si, quand on fait une mesure, on trouve l’électron tout entier en un seul point.
                 Dans d’autres conditions de représentation des comportements quan-
               tiques, on avait donné le nom d’effet tunnel à une conséquence éton-
               nante de cette mécanique. Imaginons que nous lancions une bille sur une
               piste constituée d’une bosse suivie d’une grande descente. En mécanique
               classique, de deux choses l’une : ou bien l’énergie communiquée à la bille
               lancée  est  suffisante  pour lui  faire  franchir  la  bosse,  et  la bille  arrive
               jusqu’à la descente, où elle roule de plus en plus vite ; ou bien l’énergie
               au lancer est insuffisante, et la bille ne peut pas franchir la bosse.

               Marc CARL                    Eco-Savoirs pour tous    rev.1.4 fr         © LEAI      471
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