Page 78 - Annales EH 1998-2018
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Extraits de discours de Jacques CHIRAC
ORLEANS le 03/05/2001
" Faire le choix de l'écologie humaniste, c'est faire le choix d'une démarche qui met
l'homme au centre de tout projet et lui laisse la responsabilité de son destin. C'est une
approche qui part des besoins de l'homme, sans prétendre entraver le dynamisme de nos
sociétés, mais au contraire, en l'accompagnant. Elle ne vise pas simplement à conserver un
ordre naturel immuable, qui n'a sans doute jamais existé. Elle est créative, pragmatique,
imaginative, confiante dans l'avenir de l'humanité, confiante dans l'homme. Un homme qui a
compris que son sort n'est pas distinct de celui de la nature et de l'ensemble des êtres
vivants. Un homme qui accepte de raisonner à long terme pour que ses actes d'aujourd'hui
n'hypothèquent pas son avenir.
Un homme qui continue toutefois, naturellement, à explorer les terres inconnues de la
connaissance pour améliorer son sort et celui des générations futures, sans jamais céder à
la tentation si commode de l'obscurantisme.
Nous devons nous appuyer sur les progrès de la science et de la technologie pour construire
de nouveaux modes de production et de consommation, une nouvelle relation entre l'homme
et l'économie, entre l'homme et la nature. Conjuguer le développement et le respect de
l'environnement, voilà le vrai progrès. Voilà l'ambition que la France peut se fixer. Elle serait
alors fidèle à elle-même, à son histoire, à sa culture.
Alors, au nom de cet idéal, l'écologie, le droit à un environnement protégé et préservé
doivent être considérés à l'égal des libertés publiques.
La France a progressivement acquis l'autorité nécessaire pour se porter aux avant-postes
d'une écologie humaniste.
Une politique de l'environnement efficace doit être ouverte sur le monde, car bien des mena-
ces, qui paraissent locales, sont en réalité globales.
La transition vers une écologie humaniste ne se fera pas bien entendu en un jour. Nouvelle
étape de la civilisation, elle exige détermination et patience devant les inévitables tâtonne-
ments. Chaque pays inventera sa voie. Il n'y aura pas de modèle unique, mais des principes
universels et aussi des expériences à partager.
Nous réussirons si nous mettons au service de cette écologie humaniste les progrès des
sciences et des techniques, si nous appliquons à la lutte contre la pollution la même intelli-
gence, la même créativité, qu'au développement d'activités nouvelles, et si nous faisons
prévaloir un nouvel esprit de responsabilité, une nouvelle citoyenneté et une attention gé-
néreuse au bien-être futur de nos enfants et petits-enfants.
Au fil des siècles, l'homme a pris conscience de lui-même et du monde. Il découvre aujour-
d'hui l'étendue de sa puissance et son corollaire, l'étendue de sa responsabilité, une res-
ponsabilité sans précédent dans l'histoire. Le processus de civilisation consiste dans la maî-
trise progressive de la violence physique, de la violence politique, de la violence
économique.
La France doit avoir l'ambition d'inventer une alliance nouvelle entre l'homme et la nature,
pour contribuer à dessiner et à faire vivre une mondialisation humanisée et maîtrisée. "